La présence des toros de Puerto de San Lorenzo et La Ventana del Puerto (4 et 5) faisait craindre une déception. Elle devait se confirmer. Dans un ensemble médiocre où Román a su transmettre une image de volonté et de sérieux. Certains se sont émus sur les réseaux de la rencontre d’un toro du nom de "Cubatisto" (1er du jour) avec un torero du nom de José María Manzanares en référence du 1er mai tragique de 1992, à Séville. En réalité l’atanasio-fernández qui a tragiquement croisé la route de Manolo Montoliu se nommait, en réalité, "Cabatisto", toréé par Manzanares père.
Le premier de la course est bas, montado, acucharado et cornalón. José María Manzanares exécute une longue série de véroniques et la demie, allant a más en enroulant les derniers capotazos avec confiance. La charge d’abord freinée s’allonge progressivement. À la première pique, la hampe de frêne est rompue lors de la charge au cheval. La seconde est classique et plutôt bien exécutée. Le troisième passage se construit avec une attaque vive, le palo relevé rapidement et l’animal sortant seul. Le trasteo démarre par tanteo face à un toro qui doute. Au centre, la charge "humiliée" et profonde est mise en valeur par derechazos. Dans son style habituel, distant et marginal, J.M. Manzanares répète à droite. À gauche, la marginalité du torero, ainsi que la proximité des toriles, n’incite guère le toro à s’employer. Il en va subséquemment de même à droite. Plusieurs pinchazos sont suivis d’une entière contraire. Silence.
Le quatrième de la Ventana del Puerto, bien armé, charge sans énergie la cape de JMM. Sous le fer le toro se plaint et n’insiste pas en deux rencontres légères. Manzanares réalise un tanteo élégant, puis enchaîne deux séries courtes et précautioneuses à droite. La main gauche tenant le palo à l’extrémité n’est pas plus téméraire, surtout que la charge appuie plutôt vers l’intérieur. Une dernière tentative à droite exhibe l’abandon du combat par les deux parties. Un pinchazo dans le flanc est suivi d’une lame défectueuse, portée à bout de bras. Silence.
Le premier de Román a des allures de bœuf très armé. Il freine dans la cape du matador avant de fuir. Son attitude nonchalante oblige Román à bregar sans possibilité de toreo de cape profond. La mansedumbre sous-jacente s’exprime en bagarre sous les piques avec des fuites finales. Brindis au public. Au centre Román appelle le toro qui vient, passe et s’en va. Le matador l’attend et lorsqu’il charge, il l’enroule à droite dans une série en effectuant un pas vers la trajectoire en sortie de passe et en citant de face. Il répète l’exercice, fort efficacement, en laissant du temps entre les séries et en citant de loin. La troisiéme série, servie selon les mêmes principes, met en valeur l’intelligence du torero qui comprend l’opposant. La main gauche n’est pas aussi ferme face à une charge qui se délite petit à petit. Lors du passage suivant à droite Román doit poursuivre le toro et l’obliger, finalement, à répéter le long des tablas du T7. La fin de faena a lieu devant le T6 par manoletinas en mouvement pour retenir le bicho. En terrain du T4, Román porte une demi-lame desprendida, immédiatement suivie du premier avis. Descabello. Palmas et salut.
Le cinquième de la Ventana del Puerto est le moins bien présenté ce qui explique le brouhaha venant du T7. Ses charges sont retenues et le travail de cape de Román adapté aux circonstances. Le toro pousse brièvement avant de sortir seul de la pique. La seconde plus longue est subie avec carioca. Brindis personnel. Les passes de costadillo sont suivis de passes en ligne, par le haut. Les derechazos sont lointains et les naturelles en ligne fades, face à un calamocheo gênant. Dans la série suivante à droite le torero fait l’effort pour se recentrer. La sortie de passe du toro manque de classe et d’entrega. Román insiste à droite et termine par des naturelles pied joints et de face volontaires. Demi-lame caida. Silence.
Le premier de Tomás Rufo est renvoyé aux corrales pour avarie de la patte arrière gauche. Le sobrero de Juan Pedro Domecq de nom "Milagro" saute dans la cape de telle manière qu’il est mené au centre pour lui apprendre à suivre l’engaño. Face à l’épreuve des piques, il pousse tête haute par deux fois. Brindis au public. La première série droitière est réalisée à genoux en redondo aux tercios. Debout, les fébrilités vues dans la première série se confirment. Le toro passe dans des muletazos non dominés. A gauche rien de mieux d’abord, puis avec insistance quelques narurelles isolées jaillissent. Le comportement du bicho a varié, mais les charges sont toutefois intéressantes. Tomás Rufo ne les a pas dominées. Lorsque le torero s’est croisé, le toro a chargé profondément avec intensité. Bajonazo. Silence.
La décevant lot du Puerto de San Lorenzo se termine avec un exemplaire massif et armé qui charge, avec distraction, la cape volontaire de Rufo. Le tercio de varas oscille entre le bon (placement de la pique) et le mauvais (une carioca). Brindis personnel. Le tanteo laisse percevoir une charge plus qu’utile. Au centre, Rufo cite pour des derechazos en ligne ou fuera de cacho qui confirment la qualité de charge du toro, pas celle du placement du torero. Sur l’autre corne, la charge s’est ralentie et Rufo s’adapte. Il lie de nouveau à droite, jambe de sortie effacée, et public ravi. Le T7 proteste la marginalité dans les cites et trajectoires. À gauche, l'estaquillador est tenu par l’extrémité. Seule une naturelle, engagée, ressort du lot. Un dernier passage sur jambe fléchie précède une demi-épée desprendida. Descabello. Vuelta pour une faena en dessous des possibilités proposées par le toro.
René Arneodau.
Photos: Plaza 1