Après le bon lot de Jandilla de Séville qui avait permis le triomphe de Pablo Aguado, le lot de Madrid, avec un Vegahermosa en cinquième position, n'avait rien de comparable, ni en hechuras, ni en comportement avec ce que l'on attendait de cette ganaderia. Ni la jeunesse nécessiteuse de triomphe de Ángel Téllez, ni la maturité et l'expérience de Sebastien Castella et d'Emilio De Justo n'ont su gérer la médiocrité du lot pour en tirer meilleur parti.
Le premier de Jandilla passe dans la cape d’Ángel Téllez sans idée de combattre. Ce manque d'agressivité se traduit par un comportement de manso au premier passage au cheval, puis en indolence résignée dans le second. Le toro avance vers les capes avec un désintérêt notable et sans charger, ni "humilier". Ángel Téllez confirme l'alternative des mains de Sebatián Castella, en présence d'Emilio de Justo, face à “Gallego” de Jandilla numéro 44, né en 10/14 pesant 537 Kg. Brindis TV. Les charges du bicho sont irrégulières, avançant d‘abord au pas, tirant un derrote en sortie de muletazo, puis avec un changement de rythme qui surprend le torero. À gauche le manque de celo est tout aussi patent. Le confirmant insiste pour la forme. Pinchazo. Et entière d'excellente exécution. Silence.
Le second de Jandilla est reçu par Sebastián Castella avec précaution vu le comportement erratique de l'opposant. Il donne quelques véroniques sur jambe pliée en allongeant les bras. Peu piqué, le bicho exhibe peu de propension au combat en deux piques qui laissent le toro entier. Quite d'Emilio de Justo poussif, gêné par le vent et l'animal, cérémonie de restitution des trastos. Le Français met rapidement le jandilla dans sa muleta par doblones, en profitant de la vivacité plaintive de la charge. Une première série droitière en ligne lui vaut les applaudissements du public. La série suivante va a más avec un derechazo lent et enroulé qui fait vibrer Las Ventas. A gauche le torero n'est pas à l'aise et sa prestation baisse de ton, sans lié. Lorsqu'il revient à droite le charme est rompu, le toro ayant aussi baissé en combativité. Castella insiste au centre dans les terrains de proximité en divisant les opinions. Trois-quarts de lame trasera, desprendida. Avis. Palmas.
Le second adversaire de Castella ne permet pas au matador de s'exprimer à la cape. Le toro s’emploie au cheval au premier passage puis refuse le suivant. Castella retient sa cuadrilla pour réaliser un quite par chicuelinas de menos a más, la dernière tellement enroulée que le matador évite de justesse la voltereta sur le retour, ce qu'il résout par revolera. Brindis au public de Sébastien mis en confiance par ce dernier quite. Au centre, totalement relâché, il cite pour des péndulos, le troisième se terminant en desarme. L'animal laissé cru, tarde à se fixer. Le Français le met dans la muleta en baissant la main à droite et en conduisant longuement dans un pase de pecho et, dans la série suivante, dans un changement de main. À gauche le Français ne trouve pas le positionnement adéquat pour obtenir que la répetition des charges. Les passes sont données une par une. De nouveau à droite, la muleta est accrochée et le toro tardo. La faena se termine a menos. Demi-lame trasera et tendida. Silence.
Emilio de Justo voit son premier adversaire sauter avec fébrilité dans sa cape. Mal piqué, le toro subit l'épreuve du cheval. Morenito de Arles salue au second tiers. Brindis TV. Le début de faena est vibrant par doblones sur les deux cornes, suivi d'un passage droitier avec pase de pecho. La suite sur la même corne, en ligne, perd en intensité. À gauche le matador tire des lignes, obligé car le toro ne termine aucune de ses charges sur les deux cornes. De retour à droite les passes répétitives se terminent en accrochage et desarme. Un dernier passage à gauche avec pase de desprecio et trincherilla précède deux pinchazos et une entière contraire. Silence.
Le cinquième est de Vegahermosa. Il passe dans la cape d'Emilio De Justo la tête a mi-hauteur. Bien piqué par Felix Majada, le toro s'emploie. La seconde rencontre est formelle. Quite de Téllez laborieux par chicuelinas et demi-véronique. Le début de faena par tanteo précède des derechazos accélérés, muleta accrochée. À gauche le torero, manifestement mal à l'aise, s'efforce de lier en s'écartant de la trajectoire. L'impression dans le passage droitier suivant est que le toro prend le dessus sur son matador. Entière desprendida, atravesada. Silence.
Le toricantano affronte le dernier de Jandilla qui est le premier à permettre un toreo de cape par véroniques et demi-véronique sur le passage. Le toro pousse sous la première pique et subit la seconde en sortant seul. Quite de Ángel Téllez au centre, cape dans le dos, par saltilleras et revolera. Brindis au public. A genoux, au centre, il manque de se faire emporter sur la première charge ce qui explique que la suite se passe debout. Les derechazos sont tirés en ligne, la seconde série étant plus aboutie. À gauche, le torero n'arrive pas à profiter d'une charge qui se désunit dès que le bicho atteint le leurre. Le toro devenu statique ne répond plus aux sollicitations volontaires du torero. Son insistence n'a que peu de résonance et aboutit à l'impatience d'une partie du public. Entière basse. Avis et appalaudissements discrets.
René Philippe Arneodau