La Maestranza de Séville sous un ciel gris et les tendidos couverts de parapluies donnent une image de tristesse infinie. Si la corrida, comme celle d’aujourd’hui, ne répond pas aux attentes du public sévillan et non plus aux critères qui en conditionnent l’esprit, ce spectacle, avec une des affiches les plus attrayantes de la Feria, se transforme en un breuvage difficile à avaler. Heureusement ce public est bon enfant et il ne se manifestait pas outre mesure alors que les conditions pour cela étaient réunies ou en tout cas en laissaient présager le résultat. Les toros étaient de Garcigrande et Domingo Hernández, de même origine JP Domecq, depuis quelque temps ayant leurs propres caractéristiques et la faveur des figuras. La question qui était posée, avant et surtout après la corrida, faisait référence aux poids des toros qui furent pour les garcigrande 586, 549 et 555 kg. (1er, 3ème et 5ème) et les domingo-hernández 632, 637 et 626 kg. (2ème, 4ème et 6ème). Evidemment ces poids étaient exagérés pour Séville et ne correspondaient pas non plus à la morphologie naturelle de ces toros car visiblement bien alimentés et forcis pour passer le reconocimiento des vétérinaires et du président de la course. Le trapío était absent. De surcroît leur manque de race les empêchait de surmonter ce handicap. Face à cette insupportable situation, on en vient à chercher le ou les coupables. L’éleveur pour faire passer ses toros ? les toreros pour être «tranquilles» sans crainte d’une quelconque difficulté ou risque physique? les vétérinaires «tranquilles» aussi, qui méprisent la structure des toros et celle de la Fiesta à Séville? Le public étant dans tous les cas le perdant de cette «conspiration».
Le cartel torero était une belle combinaison de talents : « Morante de la Puebla », Julián López « El Juli » et Alejandro Talavante. La corrida se déroulait à guichets fermés… sous la pluie. «El Juli » sauvait en partie la mise - la sienne et celle du public - car il coupait une oreille du 5ème, le toro le plus léger de son lot qu’il évitait de faire piquer en deux rencontres escamotées et applaudies par le public! Il profitait de la fougue initiale de ce toro nommé «Estrella» pour le recevoir dans une série de véroniques qu’il ralentissait avec remate belmontien. Entre les deux piques, le quite par de nouvelles véroniques au ralenti faisait merveille même si le style n’y était pas. A la muleta, ce fut un récital de maestría, - aux accents de Suspiros de España - passes allongées pour replacer le toro sans l’obliger, des séries de la droite entrecoupées de passes de grand temple, au ralenti encore. La fin de la faena était brouillonne car « El Juli » voulait en faire plus – c’est maintenant son habitude - le toro baissait de régime et on observait un mix de passes superbes et d’autres accrochées, le tout n’étant plus du niveau et de la qualité du début. L’estocade classique - le julipié - placée un peu en arrière assortie d’un descabello fulminant concluait la prestation d’un maître es-tauromachie malgré les scories de son style peu tourné vers l’esthétique… Sauf à la cape, en toréant par chicuelinas compas ouvert alternées avec des cordobinas dans un joli quite à son premier. Il réalisait sa faena de muleta à un toro de charge irrégulière, jouant de la corne droite, sans trop «humilier» à gauche, sans transmission, allant a menos, alors que « El Juli » faisait l’effort de construire. Pénible et maladroit à la mort.
Justement le tenant de cette esthétique et de cet art inimitable est «Morante de la Puebla». Face à des toros naturellement impossibles mais aussi à contre-style de son toreo, le maestro de La Puebla del Río ni à la cape, ni à la muleta, ne fut en mesure de satisfaire ses nombreux supporters. Il expédiait ses deux opposants habilement son premier, avec plus de précaution son second.
Alejandro Talavante n’était pas mieux loti. Il servait une faena pas très bien comprise par l’assistance car, après avoir entrepris le toro sorti 3ème, lancé de loin, par des passes de la droite bien cadencées, il s’évertuait - avec succès - à le faire passer à gauche alors qu’en deux fois il échappait à l’accrochage sur ce côté. Par la suite, ce toro ne disait rien, se «défendant» sur la corne droite. Au 6ème, c’était pire. Le toro, manso sous la pique, n’entrait ni d’un côté ni de l’autre, malgré les tentatives d’un A. Talavante malchanceux aujourd’hui aussi à l’épée.
«Morante de la Puebla» : silence ; quelques sifflets. « El Juli » : silence ; un avis et une oreille (peut-être pas majoritaire à cause des parapluies)
Georges Marcillac
Hola Georges,
Permets-moi de ne pas analyser tout à fait comme toi la réaction d une grosse partie du public au picador du Juli. Personnellement, si j ai applaudi José Antonio Barroso ce n' est pas pour la brièveté du tercio mais pour la facon dont il a exécuté la suerte lors de ces 2 rencontres avec Estrella.