La corrida de Alcurrucén (5 +1 de Lozano Hnos, 6ème) – de la famille Lozano – pour sa première présence à Madrid cette année n’a pas redoré le blason de cet élevage qui offre de temps en temps des toros importants parmi d’autres de bien moindre qualité comme ce jour. Des toros qui avaient tous les cinq ans accomplis et de présentation disparate avec des extrêmes : le 5ème, anovillado et protesté dès sa sortie et le 6ème de belles hechuras. Leur dénominateur commun fut le manque de race, sans envie de charger les capes au début et sans se déclarer vraiment à la muleta, absente la qualité qui fait la réputation de cet encaste… On assistait à l’illustration de la difficulté de confondre une des caractéristiques de ces toros d’origine Nuñez, celle d’être abantos à la sortie en piste de la mansedumbre qui se confirmait ensuite lors de l’épreuve des piques. La plupart des pensionnaires des Lozano, fuyaient dès la moindre piqûre, recherchaient des espaces vides ou bien chargeaient rageusement à contre-querencia comme le fît le 5ème. Avec ce matériel les trois matadors Curro Díaz, Joselito Adame et «Juan del Álamo» ne pouvaient pratiquement rien faire de notable. Seul le Mexicain par volonté, peut-être plus heureux au sorteo, se tirait d’affaire et coupait une oreille au 5ème.
Joselito Adame signait une faena que d’aucuns jugeront incomplète au 2ème compte tenu que ce toro, suelto aux deux premiers tercios, s’était fixé dans les statuaires au fil des lignes face au T10 et dans les séries de muleta au centre de la piste. Là, de la droite le toro passait mieux que sur la gauche, des naturelles dans lesquelles le toro tantôt s’ «ouvrait» tantôt restait court. Les deux premières séries de derechazos longs, le «compas» ouvert, pase del desprecio ou passe de poitrine en remate, lançaient une faena qui déclinait dès les passes de la gauche. De nouveau les passes de la droite et un pase circular n’apportaient rien de plus à cette faena parachevée par des manoletinas, un pase del desdén et une dernière passe de poitrine. L’estocade, un peu tombée et efficace, décidaient certains à demander l’oreille qui n’était pas accordée. Le 5ème, un modèle de mansedumbre, était amené au centre du ruedo sans qu’il soit possible de lui donner deux passes suivies. Le changement de terrain opportun, face aux chiqueros, l’insistance du Mexicain à lui présenter la muleta à chaque tentative de fuite, faisaient que sans grande envie, le toro suivait le leurre et les passes en redondo déclenchaient les olés d’un public sans doute surpris qu’on pouvait à la rigueur toréer un manso! Une dernière série de derechazos, un martinete et plusieurs passes de poitrine, des doblones mettaient fin au travail méritoire de Joselito Adame qui était primé de l’oreille après une estocade qui roulait aussitôt le (drôle de) bicho. Cette oreille était fortement protestée par le secteur «dur» de Las Ventas alors que la vuelta du torero était acclamée par le reste du public. Joselito Adame faisait, à l’occasion une belle collection de drapeaux mexicains… Avec plus ou moins de bonheur, il avait fait l’effort de meubler les quites qui lui revenaient et montré son répertoire varié à la cape.
Curro Díaz écourtait ses deux faenas face à ses deux toros auxquels il tentait quelques passes, à distance, pour les habituer à la muleta qu’ils fuyaient. Quelques pertes d’équilibre de ses toros venaient agrémenter un trasteo qui ne menait à rien. Les fans du torero de Linares croyaient voir des détails artistiques difficiles à entrevoir en ce jour néfaste car de plus Curro Díaz écopait d’une voltereta, repris au sol à la suite d’un croche-pied du toro - le 1er - qu’il avait entrepris à la naturelle. Des faenas, l’une à un toro qui restait court dans ses passages à la muleta, l’autre à un toro qui baissait la tête mais qui en fin de passe lançait des hachazos. Les mises à mort, brèves, épargnaient au public de montrer sa première déconvenue.
«Juan del Álamo», lui aussi abrégeait sa première faena faite de demi-passes sur des demi-charges d’un toro, suelto, qui n’avait pas été piqué malgré ses plusieurs «rencontres» avec le cheval. Il s’évertuait de construire une faena au 6ème, un toro qui allait et venait sans se livrer, après un joli début par des doblones suaves. Elle se déroulait ensuite dans l’indifférence générale. Une estocade entière et la succession de descabellos mettait fin à cette corrida décevante.
A leur habitude, Miguel Martín et Fernando Sánchez aux ordres de Joselito Adame devaient saluer l’ovation après leur bonne attitude aux banderilles.
Curro Díaz : saluts ??; silence. Joselito Adame ; saluts ; une oreille (division d’opinion). « Juan del Álamo » : silence ; un avis et silence. 22.179 spectateurs.
Georges Marcillac