Octavio Chacón y Pepe Moral font leur présentation dans les arènes de Bilbao face à un lot de Miura compliqué ou faible. Après les Miuras collaborateurs de ces dernières temporadas ce sont des exemplaires coriaces qui ont offert chèrement leurs oreilles ce jour. Octavio Chacón a combattu avec courage et méthode, Juan Leal avec courage et témérité en terminant à l'infirmerie, et Pepe Moral a eu à combattre un Miura et un sobrero de Salvador Domecq dont il n'a pas su tirer la quintessence. Un tiers de plaza.
Ayant tenté de toréer au capote le premier Miura, Octavio Chacón est obligé de guider le cabeceo et la charge réduite jusqu'au centre. Le toro s'emploie sans classe face aux deux piques bien travaillées de Juan Melgar. Au second tiers le bicho montre fixité et de nombreuses difficultés. Chacón, avec métier et lucidité lui montre la muleta à bout de bras, comme le fait Enrique Ponce avec les domecqs, en maintenant le corps hors trajectoire. Confiant, malgré les hachazos, Chacón est averti sur la corne gauche sur un pase de pecho. Dès la troisième série les mouvements de tête remplacent la charge et obligent Chacón à bouger, ce qui, en la circonstance, est adapté. Le bicho est impossible à gauche mais le matador y fait une tentative, suivi d'un passage à droite et enfin doblones en ayudado. Entière basse. Palmas et salut.
Le quatrième toro est un mastodonte que Chacón mène au centre. L'animal pousse sans conviction sous le fer et Pepe Moral lui donne un quite laborieux par véroniques et demi-véronique. Chacón réplique avec difficulté par chicuelias et revolera. La faena débute par le haut. Chacón essaye ensuite à droite. Le toro tire de gañafones vers le ciel et enferme le torero. Le matador passe à gauche où il fait un effort notable, muleta aidée par nécessité. Il semble impossible de toréer ensuite à droite et pourtant Chacón insiste et vole quelques derechazos méritoires. Pris au jeu, il réalise un autre série gauchère inespérée. Tout est une tauromachie à l'ancienne et courageuse. 3/4 de lame en place et bien portée. Oreille. C'est à Octavio Chacón qu'il revient de combattre le 6ème dû à la blessure de Juan Leal. L'animal est sur la réserve et semble physiquement amoindri. Il montre peu d'entrain lors des deux piques règlementaires. Le tercio de banderilles à charge de la cuadrilla du Français est tragique, le toro coupant toutes les trajectoires. Le président Matías González change le tiers avec seulement deux bâtons (les banderilles) en place. Le Miura, probón, cherche ce qui anime la muleta et ne laisse aucun répit au torero. Il n'"humilie" jamais. Chacón tente l'impossible et prend l'épée. Pinchazo et entière avec beaucoup de courage. Ovation et salut.
Pepe Moral dessine une larga cambiada de rodillas suivie de véroniques pieds joints d'abord et véroniques compas ouvert avec demie, l'ensemble de bonne facture, profitant de la bonne charge du toro. Il mène le Miura au cheval par chicuelinas marchées et le bicho se défend par à-coups sous le fer par deux fois. Brindis au public. Après tanteo, Pepe Moral torée à droite muleta en retrait avec une certaine difficulté. Le bicho développe du sentido dès avant que le matador ne fasse une tentative à gauche totalement impossible. À ce stade le Miura ne passe plus à droite non plus et Pepe Moral doit abréger malgré sa bonne volonté apparente. 3/4 de lame caída. Sifflets au toro. Applaudissements et salut. Pepe Moral reçoit l'impressionnant cinquième par deux largas de rodillas. Le toro traîne le train arrière et titube sur ses appuis. Mouchoir vert. Le sobrero est de Salvador Domecq, de beau trapío, que Pepe Moral torée avec deux véroniques puis une brega au centre du ruedo. Quite par chicuelinas et revolera. Le tercio de varas se déroule différemment avec cet opposant qui est peu piqué en comparaison avec les Miuras. Quite d'Octavio Chacón par veronicas et media véronica. Bonnes prestations de Vicente Varela et Pascual Mellinas aux palitroques. Brindis au public. Au centre Pwpe Moral exécute le double peéndulo. Dans les premiers derechazos il est mis sur la défensive en fin de passes. À gauche, il tire des naturelles longues où brille la charge du toro. Alors il revient à droite et améliore son rendement à base de "temple" et en courant la main. La faena prend son envol. Le torero enchaîne les muletazos jusqu'au meilleur passage à gauche, le corps droit et le geste naturel. La suite va a menos. Les doblones de fin ne compensent pas le fait que la faena n'a pas pleinement profité de la bonne embestida du santiago-domecq dont les deux oreilles étaient offertes. Pinchazo, metisaca dans le flanc et entière légèrement trasera. Palmas au toro. Vuelta du torero.
Le troisième Miura se blesse lors d'un remate par le haut au burladero de matadores. Juan Leal ne peut rien faire à la cape. Le public proteste alors que le toro s'emploie sous le fer. Mouchoir vert. Sort le second toro de Leal (prévu 6ème) Juan Leal se contente de bregar. Dans un capotazo mains basses de Augustin de Espartinas le toro "humilie". L'épreuve du cheval démontre que l'animal manque de forces et de désir de combattre. La brega du sus nommé et les banderilles de Marco Leal et Manolo de los Reyes valent à la cuadrilla une ovation et salut mérités. Brindis au public. À genoux, au centre Juan Leal "cite" le toro. Vaillant dans cette tentative il est pris à la sortie de la troisième passe. Le chaleco arraché, il revient pour des derechazos de combat face à un calamocheo impossible. Il prend la gauche et la présente main basse comme si de rien était en courant la main et en laissant les derrotes le menacer. Téméraire le matador entame ensuite une lutte tremendista. Il se jette à la mise à mort comme un novillero mort de faim, est pris avec cornada dans la cuisse droite, suivie d'une violente voltereta. L'épée résulte tendida et cruzada. Grande ovation et oreille pour le courage du Français qui se retire à pied, à l'infirmerie.
René Philippe Arneodau
Photos: Arjona pour aplausos.es