La corrida du 12 octobre – Fête Nationale en Espagne – est habituellement la dernière de la saison à Madrid mais la pluie persistante ce jour-là obligeait la empresa Taurodelta de la reporter à ce dimanche. C’était de surcroît la fin de l’ « ère » Taurodelta après 12 ans de gérance de Las Ventas. Maintenant, et c’était la question de la bouche des aficionados madrilènes : Qu’en sera-t-il de la temporada 2017 et de la nouvelle empresa SCP-Nautalia sous la houlette de Simón Casas et son équipe?
Des toros de Palha étaient le dernier festin attendu de tous. Ces toros portuguais, d’origine Baltasar Ibán, étaient de présentations et poids variés, les trois derniers de cinq ans révolus, tous bien armés et deux d’entr’eux de beau trapío, l’un de 466 kg !, l’autre de 544 kg, de robe carbonero, annoncé on ne sait pourquoi ensabanado. Ce dernier, un cinqueño, se révélait manso. Les autres du lot, avec quelques complications, généralement sur une seule corne, étaient donc toréables sur l’autre. Les deux premiers braves et encastés, le dernier excellent sur la corne gauche. Les tercios de piques et banderilles ne laisseront pas un grand souvenir, par le comportement de certains toros au cheval, le 2ème fortement châtié mais résistant, les autres chargeant de loin mais sans bagarre dans le peto. Carence des piqueros et banderilleros? seul Iván García, devait saluer au 6ème , à la suite d’une brega brillante et efficace.
Les palhas étaient opposés à Fernando Robleño, au mexicain Arturo Macías et à Alberto Aguilar. Chacun pouvait selon ses moyens et style se distinguer à un seul des toros qui leur étaient destinés.
Fernando Robleño recevait son premier à puerta gayola, il était bousculé et, secoué au sol, il recevait une cornada de 10 cm au niveau de l’hémithorax droit. Débarrassé de sa chaquetilla, il revenait au combat et signait une faena valeureuse, technique car il « apprenait » son toro à charger, allongeait les passes surtout à droite. Après un essai infructueux à gauche - le toro était « court » - il reprenait à droite pour des passes liées, muleta basse, sans grand style mais avec mando, fermeté et placement. L’estocade un peu tombée mais radicale valait au torero madrilène d’effectuer un tour de piste après une pétition insuffisante d’oreille. Le 4ème était ce toro, beau pour la photo mais manso, courant dans tous les sens, évitant les capes, chargeant le cheval de réserve et cherchant la porte du toril. Malgré ce comportement erratique et négatif, Fernando Robleño réussissait à le fixer au centre du ruedo et le faisait passer tant bien que mal, toro sans codicia ni intérêt pour la muleta qui terminait avisé. Estocade horizontale.
Arturo Macías ne donnait plus l’impression d’être à la merci de ses opposants tel qu’il l’avait montré lors de ses dernières prestations à Las Ventas. Au contraire, tant à la cape et surtout à la muleta, il montrait de l’assurance et « trompait » son toro en l’entreprenant juste sur la corne droite qui n’était pas la bonne, gardant la muleta basse et le forçant sans interruption à suivre le leurre. Ensuite, les naturelles étaient bien dessinées, lentes et serrées. Le toro terminait probón. Des manoletinas pour conclure la faena et une estocade évitant miraculeusement la corne droite. Le toro était applaudi a l’arrastre. Le 5ème, toro léger, acucharado de cornes, suelto, il ne demandait, néanmoins, qu’à entrer dans la muleta. En fin des passes de tanteo, il sortait par un derrote mais dès que la muleta lui était présentée basse, le défaut disparaissait, les passes étaient de bonne facture mais la faena irrégulière dans sa progression laissait penser que le mexicain était passé à côté d’un bon toro. Un pinchazo profond mettait un terme à cette faena incomplète.
Alberto Aguilar laissait échapper un succès assuré mais au 6ème il prolongeait inutilement une faena durant laquelle il avait signé les meilleures naturelles de l’après-midi, se plaisant à toréer, relâché, bien placé, artiste même. Las, deux séries de trop, le toro allait a menos et les passes perdaient de sens. Une bonne estocade, légèrement tombée - desprendida - et les descabellos qui se succédaient enlevaient toute chance du prix de l’oreille. Le 3ème n’abandonnait pas un port de tête "en l’air" même après les piques. Ce défaut s’accentuait dans la muleta, provoquant même un desarme. Le toro arrêté, grattant le sol, ne permettait plus les passes malgré l’insistance d’Alberto Aguilar qui se croisait -applaudissements et encouragements du public - pour forcer la charge. Un trois-quart d’estocade fulminait ce toro compliqué.
Fernando Robleño: tour de piste ; silence. Arturo Macías: silence ; un avis et silence. Alberto Aguilar: silence ; un avis et vuelta al ruedo.
Georges Marcillac