La corrida de toros, bien qu’une macédoine de fers autour de Garcia Jiménez, fut mieux présentée que celle d’hier, en donnant aussi plus d’émotion. Alejandro Talavante, critiqué pour sa saison en demi teinte et la substitution de dernière heure de José MaríaManzanares, a su montrer que sa place dans l’escalafón n’est pas un mirage et qu’il faut compter sur lui et sa race. Le fait qu’il soit allé par deux fois à puerta gayola n’est pas le plus notable. C’est la façon dont il a donné les largas cambiadas qu’il faut retenir. En effet, dans des conditions moins que propices, il a gardé son calme et dessiné des passes lentes, templées, au rythme des bichos, ce qui dans ce type de suerte est très inhabituel. Rafael Serna a montré beaucoup d’entrega devant le seul adversaire combattu et Andrés Roca Rey, fidèle à lui même, s’est exposé dans une routine destinée à stimuler les tendidos.
Rafael Serna prend l’alternative face à "Almendrito" de Olga Jiménez, numéro 81, né en 05/13, pesant 525 kg. Il va a puerta gayola pour recevoir son opposant par larga afarolada à genoux dont il se sauve d’un millimètre avant d’enchaîner avec des véroniques et remate que le public, ému, fête. Le bicho de belle présentation lance les sabots en avant. Au cheval, le toro fait sonner les étriers. Inspiré R. Serna exécute un quite fort esthétique par chicuelinas. À la seconde rencontre, le bicho effleure à peine le peto. Alejandro Talavante, avec peu de jugement, réalise un quite, aussi par chicuelinas, moins réussies que celles du toricantano. Alejandro Talavante donne l’alternative à Rafael Serna en présence de Andrés Roca Rey. Brindis au père. La faena débute par doblones au rythme du bicho dont la charge est incomplète. Bien que brouillons, les derechazos sont appréciés des tendidos. Plus qu’à droite, le toro essaye d’accrocher la muleta à gauche. Rafael Serna arrive cependant à lier quelques naturelles sans caché. Le jeune promu termine la faena avec plus d'intention que de réussite face à une charge bien médiocre. Entière delantera et tendida en recevant une cornada au bras, le toro n’ayant pas obéit au toque. Palmas.
Alejandro Talavante se rend à puerta gayola où il reçoit son premier adversaire à genoux par larga cambiada sans douter, avec aguante, face à un bel exemplaire qui vient au pas. Le bicho n’est pas très vif et le maestro doit le fixer avant de pouvoir lui donner des véroniques et demie véronique de belle facture. Au cheval le garcia-jiménez est peu prolixe et sort rapidement des deux rencontres. Quite à couper le souffle de Roca Rey par medios faroles et caleserinas terminées par demie véronique. En l’absence de Rafael Serna, il n’y a pas de cérémonie de restitution de trastos. Le début de faena par le bas est bien conduit et somptueux, sous estimé par les tendidos. La première série à gauche est adoubée par le public sévillan. A. Talavante a trouvé le rythme mais le bicho fléchit parce qu’il est dominé par le bas. Peu à peu le maestro s’impose avec torería sur les deux cornes, les seules scories venant des hésitations du toro. Le tout culmine dans une série gauchère au ralenti et de face au centre du ruedo. Les dernières tentatives montrent que le bicho n’a plus rien à offrir. Plusieurs pinchazos gâchent le triomphe. Avis avec entière trasera et tendida. Applaudissements à l'arrastre du toro. Palmas et salut.
Le second de Alejandro Talavante est reçu de manière appliquée et laborieuse à la cape. Le public proteste les fléchissements du toro avant que celui-ci ne renverse cheval et cavalier. La seconde pique est un simulacre. Le bicho n’humilie ni aux banderilles ni dans les capes. Juan José Trujillo salut pour deux paires de palitroques engagées. A. Talavante prend promptement la droite pour des muletazos liés à mi hauteur. À gauche, la charge indolente et irrégulière ne permet pas d’enchaîner. Retour à droite pour des derechazos et pase de pecho qui lancent la musique. A. Talavante soumet le toro qui après trois muletazos se met à douter dans des séries qui, de facto, vont a menos. Manoletinas finales. Entière au ralenti en se faisant prendre et tournoyer sur les cornes. Une oreille.
Rafael Serna blessé, c’est à Alejandro Talavante que revient la responsabilité de combattre le dernier exemplaire de Peña de Francia. Dans un geste de macho, Talavante va «a toriles» pour recevoir à genoux le bicho. Avec temple, il passe en larga cambiada ce toro qui avance sur lui sans conviction. Malheureusement l’animal est sur la réserve et distrait, ne permettant pas de toreo de cape. Deux piques sont prises al relance, partout en piste sauf à l’endroit prévu. La mansedumbre latente est infirmée dans la troisième rencontre chargée de loin, mais poussée tête haute. Clarinazo du dernier toro de l’abono. Talavante prend vite la mesure du toro à droite dont la charge est vive et répétitive. Le temple du maestro fait le reste. À gauche, l’animal cesse de charger. Talavante a tout le mal du monde à dessiner trois naturelles liées. Rien ne va plus, le maestro prend l’acier. Entière basse.
Andrés Roca Rey passe son premier toro, abanto, en véroniques appliquées. Le manso fait le tour du ruedo à sa guise pour un refilón pris face aux tendidos du soleil et une vara. Quite de Alejandro Talavante par delantales. Suit une nouvelle pique sans conviction. L’animal développe des complications au second tiers. Rapidement A. Roca Rey le met dans sa muleta aimantée. À droite le bicho se soumet et suit la muleta par le bas. Ensuite il proteste. À gauche, le toro est arrêté et le Péruvien doit le forcer. Un final en arrimón permet au torero de se justifier. Metisaca et entière basse. Palmas et salut.
Le cinquième comme le premier est de Olga Jiménez. Andrés Roca Rey soumet sa charge vive en véroniques pieds joints et une demie véronique. Sous le fer, le toro proteste puis pousse. Dans la seconde rencontre il combat par à-coups puis sort seul. Quite du matador par saltilleras qui ravissent les tendidos. Le bicho ne respecte pas toujours les toques et garde la tête relevée au second tiers. Brindis au public. Le double péndulo fait frémir le public. À droite, compte tenu du vent qui s’est levé, le torero baisse la main pour des derechazos brusques et accrochés qui vont a más. À gauche, le Péruvien impose sa quiétude à la brusquerie et se réfugie dans les fioritures d’abord, puis dans des naturelles "citées" avec sincérité malgré les imperfections de l’embestida. Pinchazo et entière desprendida. Palmas et salut.
René Philippe Arneodau.