Les toros de Alcurrucén sont habituellement les garanties d’un succès et le lot de ce jour n’a pas failli. Ces toros d’origine Carlos Nuñez offraient toute une gamme de qualités et défauts qui font l’intérêt d’une corrida de la famille Lozano. Au contraire du 29 mai dernier, la présentation des toros était correcte en armures et avec des poids allant de 521 à 560 kg. pour les cinq exemplaires du lot complété par un de « El Cortijillo » qui, lui, pesait 546 kg. Il y eut des toros braves - les 3ème (à la muleta) et 4ème - et des mansos – les 5ème et 6ème. Ils donnaient un spectacle varié et émouvant spécialement lors de la faena du triomphateur de l’après-midi : Juan del Álamo qui coupait une oreille à chacun de ses opposants. Ce triomphe était accompagné d’une polémique car le président n’octroyait pas la deuxième oreille du 3ème. En effet, il restait insensible à la demande unanime, alors que la faena de Juan del Álamo méritait la double récompense. La plaza dans sa totalité adressait une bronca sonore à ce président aveugle ou sourd, ou les deux à la fois.
Le toro, de nom « Licenciado» de 551 kg. né en 12/11 – donc 5 ans et demi – sortait du toril au pas et Juan del Álamo se heurtait dans un premier temps à un bloc qui ne bougeait pas ou bien même paraissait apeuré dès que la cape lui était présentée. Néanmoins, le torero salmantin parvenait à mettre le toro dans la cape dans des véroniques qui auguraient pour la suite une charge claire, vive et « humiliée ». Il restait à savoir si cela était le comportement normal d’un animal couard ou au contraire celui dont on découvrait une bravoure insoupçonnée. Aux piques le résultat était contradictoire car d’un contact avec le picador de réserve, « Licenciado » s’échappait dès la première piqûre puis prenait une bonne pique avec le titulaire, tête fixe dans le peto et un autre picotazo et sortie suelto. Rien de bien positif en vérité. Juan del Álamo allait au centre du ruedo pour des doblones longs et « templés » pour fixer le toro. A partir de cet instant, le toro ne quittait plus la muleta dans des séries émouvantes car il se déplaçait avec vigueur et entrega, « humilié » et répétitif, avec profondeur dans une charge longue et constante qui permettait l’enchaînement – ligazón – des naturelles et derechazos vibrants, assortis d’un farol ou molinete liés à la passe de poitrine. En conclusion de cette courte faena, des doblones, à nouveau, des passes par le bas et une naturelle de remate pour fixer et cadrer le toro avant de placer une estocade entière, au bon endroit. Le toro, au centre, tardait à mourir en brave ! Venaient les demandes d’oreille et les deux vueltas d’un Juan del Álamo, heureux mais aussi dépité par la décision du président. Au 6ème, après les péripéties de poursuite et esquives d’un toro manso, piqué tour à tour par les deux piqueros, l’un chutant dans un assaut brutal de « Bocineto » coureur et costaud de ses 550 kg, Juan del Álamo allait chercher son toro au centre de la piste pour la faena. Rageur et violent dans ses entrées à la muleta, le toro permettait à son matador de livrer un combat émouvant dans des séries courtes et pas toujours bien terminées sur les retours du manso qui finissait par s’arrêter, vaincu, mais prêt à charger à tout instant. L’estocade tombée entraînait une mort spectaculaire du toro et une oreille (de compensation) était demandée. La faena, en autre occasion, n’aurait pas mérité l’oreille.
Manuel Jesús « El Cid » passait près d’un succès qui aurait fait bien à sa carrière déclinante. Sa déficience à l’épée au 4ème terminait mal une faena à toro brave qui ne se départait pas de ses qualités de charge, la tête basse. La faena débutait au centre du ruedo par des derechazos pas très convaincants mais les naturelles, au contraire, plus serrées en fin de série et bien liées avec remate de la passe de poitrine, donnaient une autre allure au trasteo de « El Cid ». Le toro, de nom « Antequerano », par son port de tête, avant et pendant la charge, transmettait cette impression qu’il voulait se saisir de la muleta finalement inaccessible. Le mérite de « El Cid » fut de canaliser cette fougue jusqu’au ralentissement de la charge. De jolies passes pour mettre en suerte pour la mise à mort et le pinchazo suivi d’une estocade entière refroidissaient le public prêt à demander l’oreille. Dommage que ce public n'ait pas mieux manifesté sa satisfaction de voir et apprécier le toreo classique de "El Cid" Applaudissements au toro à l’arratre. Il n’y eut pas de faena au premier, un toro distrait et inconstant dans une faena bougée, le torero n’étant visiblement pas à l’aise. Il n’était pas possible de juger ni le toro, ni le torero. Une estocade horizontale et un descabello. Rien !
Joselito Adame tombait sur deux toros peu coopératifs. Le premier permettait des passes mais il ne provoquait ni l’intérêt du torero et encore moins celui du public. Des passes qui ne « disaient » rien. La maladresse ou la prudence à la mise à mort avaient pour résultat une série de pinchazos… Le 5ème, n’était guère mieux, il sortait de la cape et maintenait se défaut à la muleta, obligeant le Mexicain à se repositionner après chaque passe. Cela n’était pas du goût du public qui le faisait injustement savoir au torero qui devait abréger. L’insipidité de l’animal, de surcroît difficile à mettre en suerte ajoutée à l’impatience du public, ruinaient les espoirs de Joselito Adame de confirmer sa disposition et l’oreille coupée il y a une semaine.
Miguel Martín et Fernando Sánchez, des habitués, saluaient après la pose des banderilles au 2ème. Bronca tonitruante au président pour ne pas accorder la seconde oreille à Juan del Álamo au 3ème.
Manuel Jesús « El Cid »: silence ; saluts. Joselito Adame: un avis et silence; un avis et sifflets. Juan del Álamo: oreille et deux vueltas; oreille et sortie par la Puerta Grande
Georges Marcillac
merci Georges ce soir je serai aussi à Madrid