Fernando Robleño est accueilli par une ovation, et salut, dans ce qui sera sa dernière Feria de San Isidro.
Dolores Aguirre a envoyé à Las Ventas un lot inégal en présentation et médiocre en contenu. Une immense déception pour les admirateurs de cette ganadería légendaire. Dans des circonstances compliquées, c’est Juan de Castilla qui a tiré son épingle du jeu, non par le résultat artistique mais par son comportement lors de ses deux prestations.
Le premier toro de Fernando Robleño est bovin d’apparence, zancudo, avec un trot pesant. Ses charges manquent d’entrega et il tourne longuement en cherchant une porte de sortie. Le matador le fixe brièvement. L’animal prend la première mauvaise pique en manso, contournant le cheval par l’avant. Dans la seconde, il est plus actif, mais le cavalier est encore médiocre. Fdo. Robleño entame son travail par tanteo, en poursuivant le morucho. Il arrive ensuite à lier des derechazos, en deux passages, dans lesquels le toro charge sans classe. Sur la gauche, le matador est appliqué, tirant la charge vers l’intérieur après l’embroque. Le bicho est noble et Robleño le passe de nouveau sur les deux cornes avec efficacité à droite deux fois, et des naturelles une par une, car le bicho est abanto. Deux pinchazos et un bajonazo terminent la faena. Silence.
Le second Dolores Aguirre pour Fernando Robleño est bas, armé large. Le toro accélère à hauteur de cape et tire des coups de corne. Il pousse sous une première carioca dont il sort seul pour traverser la piste. Placé loin, il retourne au pas, avec hésitation, puis fonce et pousse avant de fuir. Au second tiers, le bicho vient au pas, puis accélère à hauteur de sa proie. Il est tout sauf clair. Robleño opte pour un tanteo probatoire long. Il exécute des derechazos avec précaution en se retirant de la trajectoire du toro dès que la tête est dans le leurre. L’incertitude l’incite à prendre l’épée. Entière basse. Deux descabellos. Pitos.
Le premier toro de Damián Castaño est terciado, bajo, corniabierto. Le matador réalise une brega vers le centre. Le bicho pousse sous une pique rapidement relevée. Placé loin, il retourne avec verve, en allant ensuite a menos. Quite de Juan de Castilla par gaoneras et revolera réalisées avec courage, la cape étant touchée sur certaines passes. La faena débute par tanteo suivi de derechazos dans lesquels le dolores-aguirre trébuche lorsque Castaño l’oblige. Quelques droitières, corps relâché, éveillent l’intérêt du public. Sur un parón, le toro adresse un regard préoccupant au matador, ce dernier étant al hilo ou même davantage en retrait. Il poursuit sur la droite, exigeant dans les trajectoires, mais le toro ne le supporte pas. À gauche, les tentatives ne débouchent pas sur une série complète. Bajonazo en couvrant la tête de la muleta. Silence.
Le cinquième est un colorado de belle allure, cornivuelto. Il est le premier à entrer clairement dans la cape et à terminer sa charge loin. Castaño ne l’a pas vu ainsi. Le toro combat d’abord la tête relevée au cheval pour ensuite pousser sous le peto. Avant la seconde pique, sa tendance est d’aller à la querencia et de refuser le placement au cheval dans la contra-querencia. Lorsqu’il prend finalement la seconde puya, il est combatif, puis sort seul. Bonne prestation de Juan Sierra avec les bâtonnets. Castaño opte rapidement pour la gauche. L’intention est notable, la charge irrégulière. La première série droitière embarque la charge avec détermination, main basse. Le torero poursuit sur cette corne, obligé de se replacer entre les muletazos, car le toro est devenu tardo. Ses charges sont maintenant calculées et il est difficile de se confier. Le matador le tente pourtant, avec quelques muletazos esthétiques qui lui valent des olés. Les meilleurs muletazos sont des trincherazos, des pases de la firma et des cambios de mano vers les planches. Pinchazo et entière desprendida portée en couvrant les cornes de la muleta Salut.
Juan de Castilla est opposé au troisième toro de la corrida, de peu de trapío et armé légèrement veleto. Le Colombien le mène au centre avec application. Le toro se plaint lors de la première pique bien portée. La seconde est médiocre de la part des deux participants. Le bicho tire des derrotes vers les banderilleros au second tiers. Le matador débute par doblones. Il cite ensuite de loin, vers les toriles, pour des droitières en donnant la sortie vers l’intérieur. Il se fait bousculer et est envoyé dans les airs, heureusement avec des blessures superficielles. Seule la taleguilla est rompue à l’endroit le plus inopportun, problème résolu par le port d’un bermuda. Vaillant, Juan de Castilla poursuit à droite en conduisant la charge pour une série complète. Il torée sur les deux cornes avec aguante comme si le toro était bon, ce qui n’est pas le cas. En effet, ce dernier s’arrête souvent dans les passes ou ne les complète pas. Le torero finit sur la défensive. Estoconazo. Le toro se relève à plusieurs reprises, en luttant jusqu’au bout. Pétition d’oreille et vuelta. Applaudissements inopportuns au toro.
Juan de Castilla va a puerta gayola dans une corrida dont les toros n’ont pas démontré qu’ils étaient propices pour cette suerte. La larga cambiada est servie à un toro venant au pas. Cet exemplaire massif et distrait est reçu par quelques véroniques et la demi-véronique dans un ensemble décousu. Le dolores-aguirre pousse une fois, puis, placé loin, il ignore le cheval avant de le charger pour une pique manquée par le cavalier. Brindis au public. Après tanteo, c’est à gauche que le torero souhaite entreprendre le toro. De nombreux cites ne donnent rien, car le bicho est rajado. Juan de Castilla tente à droite longuement sans résultat. Metisaca dans le flanc et demi-lame tendida et atravesada. Silence.
René Arneodau