Espoirs, doutes et courage.

Je crois pouvoir dire que la Tauromachie est ma religion. Je suis devenu "Tauromache" par choix et conviction en renonçant à ma religion de naissance. La découverte de la Tauromachie a l'âge de 10 ans a été pour moi une révélation mais aussi une évidence.  Elle a marqué ma vision des relations humaines, des relations avec les animaux, ma conception de la morale, de la vérité et de l'honneur.  Cela ne s'est pas déroulé en un jour ! Non, mais petit à petit, au fur et à mesure que je me suis éduqué et cultivé aux choses de la tauromachie.  J'ai appris à apprécier les animaux pour ce qu'ils sont en m'intéressant à leurs particularités.  J'ai compris que le fermier qui tuait un lapin ou une poule pour nous le faire manger n'était pas méchant et que son chien avait un rôle dans sa ferme pour l'aider dans l'élevage de ses moutons destinés, à terme, à l'abattoir ou aux rituels de l'Aid El Kebir.  J'ai également compris que les animaux domestiques étaient faits pour le plaisir et la compagnie de l'homme.

Contrairement à tout le négatif que projettent sur l'aficionado ceux qui vilipendent la corrida, je n'y ait toujours vu que des principes positifs et moraux.  Comme dans toute chose il existe des écarts.  Pour l'église catholique ce sont, par exemple, les cas de pédophilie, pour la religion Musulmane les excès de l'extrémisme, pour la politique les affaires,  et ainsi de suite.  Les médias s'efforcent parfois, sur ces sujets,  de faire la part des choses pour ne pas jeter systématiquement l'enfant avec l'eau du bain.  Avec la tauromachie ils ne le font pas.  La Tauromachie a aussi ses excès mais elle renferme également d'extraordinaires principes et valeurs.   Elle a le défaut en ces temps modernes de ne pas occulter la mort.  Ni celle de l'animal, ni celle de l'homme.

Ce qui a créé en moi un conflit  délicat à gérer, dans mes premières années d'Aficion, c'est le fait qu'en allant aux Corridas je savais à chaque instant que je pouvais être témoin de la blessure ou de la mort d'un être Humain.  Ce dilemme je l'ai résolu en intégrant la compréhension de ce qu'est le Toro de combat,  la ritualisation du combat et  la pureté des principes qui le sous-tendent.  Le combat du Toro dans l'arène me paraît être une évidence tout autant que la poursuite et la mise à mort d'une gazelle thomson dans la savane par un guépard,  d'un zèbre par une lionne, ou d'un gnou par un crocodile lorsqu'il traverse la rivière.  Dans la nature la mort fait partie du tout et la mort a ses codes.  Elle contribue à la survie, au renouvellement, à l'équilibre.  Ce n'est ni bien ni mal, c'est une évidence.  Il y a évidence lorsque le comportement des animaux est conforme à ce qu'ils sont, conforme aux caractéristiques que la nature leur a attribuées.  Il en va de même pour le toro de combat quand il rencontre l'homme dans l'arène.

Ceux qui y voient du mal projettent sur nous ce qui fourmille dans leur cerveau et dans leur âme.  La bataille que mènent les anti-corrida a pour seul objectif de convaincre les non informés de leur "projection" et surtout les convaincre du fait que les Aficionados seraient de mauvaises gens .  Ce sont ces non informés, devenus des proies, qui intéressent les antis et non pas le toro de combat.  Car de lui ils ne savent rien et ils n'ont aucune intention de combler leur ignorance.

La Tauromachie véhicule une richesse de sentiments et de valeurs dont les Aficionados et les professionnels de la Tauromachie sont les protecteurs et les témoins.  Leur témoignage n'a jamais été plus importante et nécessaire qu'actuellement.  L'évolution récente de la Corrida tend à déplacer les fondements de la tauromachie de la sphère du rituel et de l'épreuve, vers celle du  spectacle et de sa prévisibilité chorégraphiée.  Cette évolution fragilise ses fondements traditionnels que sont la sincérité, le courage, le risque et l'intégrité.  Ce sont ces principes qui nous permettent pourtant d'expliquer l'équilibre de la corrida.  Si le Toro est moins sauvage et moins féroce alors le risque encouru par l'homme est moindre.  Et si de surcroît le torero applique des techniques qui permettent de rendre le spectacle plus répétitif en réduisant la prise de risque,  il ferme les vannes de l'inspiration et de la fulgurance qui jaillissent de la maîtrise esthétique du danger.  En effet l'Art en tauromachie ne résulte pas de la réalisation mécanique des passes en elles mêmes. Ce qui importe et ce qui crée l'Art ce sont la manières et les circonstances dans lesquelles les passes sont exécutées.

Les derniers mois de l'année 2014 ont été riches en informations qui, si ont les rapprochent, peignent un curieux tableau   de l'environnement Tauromachique.  Après Joselito à Istres ce sont El Soro, Espartaco, Davila Miura, Javier Vazquez, Antonio

" href="https://toreoyarte.com/glossaire/barrera/" target="_blank" data-mobile-support="0" data-gt-translate-attributes='[{"attribute":"data-cmtooltip", "format":"html"}]' tabindex="0" role="link">Barrera, Rivera Ordoñez ou Jesulin qui ont taquiné l'idée d'un retour aux ruedos.  Pour un jour disent certains.  Le cas du Soro est, bien évidemment, à part compte tenu de l'incroyable lutte et de l'effort qu'il a du consentir pour revêtir de nouveau l'habit de lumière. Pour le moins, la prolifération des tentations de retour, est indicative du niveau actuel de notre rituel.  Sinon comment expliquer que tant de prétendants pensent qu'ils pourraient en affronter le test.  Ces velléités de retour sont d'autant plus surprenantes que les places dans les cartels vont être rares et distribuées au compte goutte, avec souvent l'adoubement nécessaire des Figuras.  Les figuras du G5, dont on disait il y a peu, que leur démarche avait été un échec, d'où leur rupture, ont pourtant vu l'" href="https://toreoyarte.com/glossaire/empresa/" target="_blank" data-mobile-support="0" data-gt-translate-attributes='[{"attribute":"data-cmtooltip", "format":"html"}]' tabindex="0" role="link">Empresa de Séville (Canorea) leur présenter, par média interposé, des excuses avec l'espoir d'assurer leur intégration à la
" href="https://toreoyarte.com/glossaire/feria/" target="_blank" data-mobile-support="0" data-gt-translate-attributes='[{"attribute":"data-cmtooltip", "format":"html"}]' tabindex="0" role="link">Feria 2015.  L'engagement de Manzanares a été annoncée dans la foulée.  Au même moment l'Empresa de Madrid (Uranga) déclare qu'il faut ouvrir et varier les cartels.  Le premier " lorsqu'il jouit d'une certaine notoriété et estime du public.
  • "Caerse del cartel" (tomber du cartel) est le fait pour un Matador d'annuler sa participation à la corrida pour laquelle il avait été engagé.
  • Cartel de Lujo est un programme, une affiche composé de Toreros vedettes.
  • " href="https://toreoyarte.com/glossaire/cartel/" target="_blank" data-mobile-support="0" data-gt-translate-attributes='[{"attribute":"data-cmtooltip", "format":"html"}]' tabindex="0" role="link">cartel de l'année annoncé à Madrid est le seul contre six de Fandiño en début de saison.

    Pendant ce temps Perera  fait une déclaration on ne peut plus mal choisie à propos de Barcelone.  Il dit que la Tauromachie y était destinée à disparaître à cause de la mauvaise gestion de l'Empresa, comme s'il s'agissait d'un fait accompli irréversible.  Même s'il y a un fond de vérité sur le diagnostic, n'aurait-il pas été plus constructif de simplement souhaiter la réouverture et proposer une participation au cartel de la renaissance.  Car  l'Aficion de base souhaite et agit pour la réouverture des arènes fermées.  C'est également le cas à Fréjus et à San Sebastian .  Le retour des toros dans ces Arènes seront des marqueurs de notre lutte.  Ce ne sont pas les reportages de toreros toréant dans un salon qui à terme sauveront la Corrida, ni les retours des anciens s'ils ne sont pas inspirés par la même profondeur et le même engagement que les retours d'Antoñete ou de Manolo Vazquez il y a quelques décennies.

    Si Victoriano del Rio a eu raison de déclarer que de nos jours le public souhaite au moins quatre bon toros par corrida, il faut encore nuancer sur ce que l'on entend, à contrario, par mauvais toro.  Si le toro est mobile et plein d'énergie dans tous les tiers alors l'échec de l'aspect artistique du combat n'est pas de la même nature que si, à l'inverse, le toro est immobile, sans énergie, ne répondant qu'au dixième ou quinzième cite de chaque passe.  L'échec fait partie de la tauromachie, encore plus lorsque le toro est dans sa plénitude et met son opposant à l'épreuve.  Le triomphe devrait, en tauromachie, rester une exception comme signe de la difficulté du combat.  La  confusion se poursuit lorsque Victoriano del Rio déclare que les encastes n'existe pas, que ce sont les ganaderos qui existent.  Allez expliquer cela à Terres Taurines qui depuis 10 ans fait le tour de la planète Toro pour nous faire découvrir la richesse des encastes.  Oui ce sont les ganaderos qui impriment leur créativité à la sélection, mais justement, le challenge est aussi de faire fructifier cette créativité avec tous les encastes.  Heureusement, il y a des éleveurs qui relèvent le défi et nous donnent de l'espoir.  D'ailleurs Victoriano del Rio sait aussi fournir des toros d'émotion.

    Parmis les Toreros qui rompra, en 2015, avec la léthargie imposée par l'ineffable succès de la technique du Juli , inspirateur de nombreux prétendants de l'escalafon?  Il y a Fandiño, qui en annonçant une

    " href="https://toreoyarte.com/glossaire/encerrona/" target="_blank" data-mobile-support="0" data-gt-translate-attributes='[{"attribute":"data-cmtooltip", "format":"html"}]' tabindex="0" role="link">encerrona à Madrid, en début de saison, avec 6 élevages des ganaderias supposées dures et peu prisées par les figuras, prend un risque notable.  Les risques devraient  faire partie des choix des toreros.  Ils seront nombreux en embuscade pour vilipender Fandiño en cas d'échec.  Mais s'il réussit et que la mayonnaise médiatique prend ce pourrait être un révulsif important pour autant que le torero poursuive dans ce créneaux de ganaderias où son toreo gagne en relief.   Puis il y a José Tomas qui reprendra l'épée, très probablement, au Mexique dans les semaines à venir.  Les grandes vertus du toreo de José Tomas sont la simplicité, la sincérité, le risque et le courage.  Ces principes sont d'autant plus importants à respecter que la noblesse des toros est exacerbée dans la sélection actuelle.  Le spectacle de la tauromachie défensive inspirée du Juli n'est  pas digne de la grande noblesse du toro actuel.  Au plus le toro est noble, au plus on se doit de le toréer avec sincérité et courage.  Les nuances entre les différentes techniques du toreo sont parfois difficiles à percevoir.  Mais elles existent et lorsqu'on développe son aptitude à les distinguer on peut alors apprécier toute la grandeur de la tauromachie dans ses fondements universels.

    2015 peut être la Saison. Dans le langage taurin, la temporada est la période de l’année réduite à la saison taurine de mars à octobre. Certains toreros font aussi leur temporada aux Amériques - Mexique, Colombie, Pérou, Equateur ou Vénézuela - de novembre à avril.

    " href="https://toreoyarte.com/glossaire/temporada/" target="_blank" data-mobile-support="0" data-gt-translate-attributes='[{"attribute":"data-cmtooltip", "format":"html"}]' tabindex="0" role="link">temporada de la poursuite des fermetures d'Arènes, de la poursuite de la baisse du nombre de spectacles, de ganaderias et d'encastes, et de l'uniformisation du toreo.  Mais elle peut être aussi celle de la compétition au sommet, de l'ouverture des opportunités, de l'originalité et de la variété, ainsi que du retour du public aux arènes.  Nous sommes un peu, nous Aficionados et Mundillo, comme ces peuples indigènes découverts par des conquistadors du monde moderne à qui ces derniers veulent imposer leurs valeurs et retirer les leurs.  C'est la recette de la disparition des peuples indigènes. Ce ne doit pas être le cas pour nous.  Notre bataille est celle de la défense du mythe du toro.  Empreinte de courage, sincérité et créativité la temporada à venir devra marquer l'affirmation et la survie de notre tradition, la tradition du  "toro" de combat. René Ph. Arneodau
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