Le mano a mano de cette feria réunissait avec raison le triomphateur de la dernière San Isidro et Fernando Adrián torero révélation de l’an dernier mais aussi assidu aux sorties par la Grande Porte de Las Ventas et autres arèrnes espagnoles et françaises. Pour cela ils affrontaient des toros de Victoriano del Río dont les résultats de cette fin de saision (Cf: dernière feria de San Miguel) laissaient augurer une “grande tarde”. Les aficionados restaient sur leur faim car la deuxième partie de la corrida ne perdait pas d’intérêt mais le niveau baissait aussi bien celui des toros que celui des deux matadors. Les trois premiers toros de l’élevage de Guadalix de la Sierra (Madrid) recevaient les applaudissements à l’arrastre car leur bravoure et surtout la caste du 3ème ravissaient les spectateurs. Seul le 5ème, malgré ses 552 kg, terciado, dépareillait du reste du lot, toros bien armés, certains veletos, les cinqueños, le 6ème, hondo pour 573 kg. Quant aux toreros, ils donnèrent l’impression de ne pouvoir surmonter la pression que supposait ce mano a mano devant le public exigeant de Madrid et l’espoir qu’ils avaient suscité. Les lacunes à l’épée de Borja Jiménez lui faisait perdre un succès plus consistant et les oreilles à la clé alors que Fernando Adrián, lui, ne donnait même pas l’impression de se hisser au niveau de son compagnon de cartel.
Fernando Adrián allait à porta gaîola, un semblant de larga cambiada de rodilla et le toro filait tout droit… Aux tercios, trois faroles à genoux et au centre de la piste, deux chicuelinas sèches et revolera, le toro sortant du lance au lieu de suivre le mouvement de cape. Tel était le début de cette lidia sans que le toro ait été fixé ni vraiment toréé. Une bonne charge au cheval pour deux piques, soutenue mais non appuyée la première, plus courte la deuxième. Le tercio de banderilles voyait l’application des hommes de la cuadrilla. La faena de muleta passait par des hauts et des bas: un cambio dans le dos au moment du tanteo…; des séries de la droite et une seule vraiment bonne, avec mando et temple. Accrochages de muleta sur la droite et baisse de régime du toro. Les manoletinas, pour donner le change, ne faisaient qu’accentuer les problèmes de tête. Une estocade basse déclenchait une vague de sifflets alors que le toro, de note au-dessus du torero, était applaudi à l’arrasttre. Au 3ème, après un nouveau farol à genoux de réception, le toro débordait Fernando Adrián dans des charges courtes à la cape face au T10. La première pique, rechargée etait suivie d’un picotazo. Changement… Après un bon début de faena par des passes par le haut, le toro prenait le dessus de telle sorte que les premières naturelles étaient bougées. Sur la droite, le toro était mieux fixé sur des charges courtes, la tête “humiliée” faisant quasi “l’avion! Les accrochages de muleta des naturelles qui suivaient, entraînaient des réactions du toro non maîtrisées. La faena se prolongeait… Une estocade arrière venait à bout de ce toro dont la mort lente était applaudie. Au 5ème, Fernando Adrián ne réalisait rien de notable à la cape. Alberto Sandoval, à la pique dosait l’exercice. Marcos Prieto clouait les banderilles al sesgo por fuera, suerte rare de la part d’un banderillero de cuadrilla, le toro appuyé aux barrières. La faena de muleta était entamée par un péndulo à genoux, doublé, et dans cette position, Fernando Adrián enchaînait par une passe en rond, le toro s’arrêtait et l’accrochait… sans mal. Malgré cela, il réalisait en suivant des derechazos courts et la passe du mépris en remate. Sur la gauche, c’était moins bien et moins facile, des naturelles une à une, et une nouvelle cogida. Les bernadinas embrouillées qui suivaient, protestées par le public – palmas de tango! – précédaient, à la mort, un pinchazo hondo et deux descabellos. Un avis.
Borja Jiménez allait trois fois à porta gaïola (il en avait fait de même à Bilbao lors d’un autre mano a mano avec Daniel Luque) et c’est à son premier toro que la larga cambiada à genoux pouvait être suivie de quelques véroniques, longues, sur la charge véloce du toro pour un début éclatant. ”Tito” Sandoval était applaudi pour deux piques, la première poussée jusqu’aux tablas après une charge décidée du toro, brave face au cheval. La qualité de charge – bon tranco - se maintenait au deuxième tiers. Brindis au public. Assis sur le marchepied de la barrière, Borja passait par le haut le toro pour, ensuite dans des doblones, prendre la mesure de l’animal qui passait mieux sur la corne gauche. Ce-dernier s’”ouvrait” dans les premiers derechazos puis raccourcissait sa charge. Bonne série de la droite, “templée”, Borja “citait” à distance pour la première passe de séries de la droite et de la gauche. La dernière série, toréant vertical, par les vuelos de la muleta confirmait la sérénité et la maîtrise de l’Espartinero ( NDLR: torero natif d’Espartinas) en fin de faena complétée de brillants doblones et ayudados por alto, genou en terre. Malheureusement la mise à mort n’était pas aussi brillante: un pinchazo et une estocade desprendida, trasera, quand sonnait un avis. Le 4ème chargeait al relance dans le tercio le picador pour la première pique. En réalité peu piqué. Était bien commencée la faena par des doblones enchaînés cette fois-ci, les deux genoux en terre, à des passes en rond pour une charge descompuesta du toro. La suite perdait de l’intérêt à cause du toro qui chargeait accéléré dans des derechazos courts et desarme répété. En l’absence de ligazón des dernières naturelles, fins de passes tête en l’air du toro, il fallait en finir: ce qui fut fait par un pinchazo bas sur un démarrage impromptu du toro. Suivait une demi-épée basse. Un avis. Un descabello. Après une puerta gayola hasardeuse, le 6ème cherchait la porte de sortie par où il était entré... Il poussait fort le cheval jusqu’aux tablas, raisonnablement piqué par Manuel José Ruiz “Espartaco”. Après de bons muletazos, toréés, le toro sortait de la muleta pour finir pratiquement arrêté et ne plus charger. Une estocade tendida en bajonazo. Un avis.
Fernando Adrián: división (applaudissements et sifflets); silence; un avis et saluts (protestés). Borja Jiménez: un avis et vuelta al ruedo; silence; silence. Des cuadrillas on distinguait Curro Javier à la brega et aux banderilles (un paire risquée au 3ème), Marcos Prieto idem aux ordres de Fernando Adrián. Les picadors “Tito” Sandoval et “Espartaco” applaudis au 2ème et 6ème respectivement. Les trois premiers de Victoriano del Río applaudis à l’arrastre. Les autres sifflés… 21.412 spectateurs. |
Georges Marcillac
Photos: Plaza 1