Alors que le mano a mano d’hier était dans toutes les conversations des aficionados, celui d’aujourd’hui suscitait autant d’intérêt avec le face à face Julián López « El Juli » et Alberto López Simón, l’autre jeune loup qui, après la saison triomphale de l’an dernier, va être confronté aux figuras bien assis sur leurs lauriers et qui devront batailler pour maintenir leur statut. Des toros de Garcigrande et de Domingo Hernández (5ème et 6ème) avaient été choisis pour ce duel au sommet. De présentation modeste avec les qualités et défauts de cette ligne jp domecq, ils allaient permettre, malgré tout, de mettre en évidence les vertus d’un torero déjà vétéran et les lacunes ou limites d’un torero émergeant.
Les deux sont sortis a hombros par la Grande Porte de la plaza de Jativa, pour avoir coupé deux fois une oreille, ces prix ayant une valeur différente selon la performance de chacun. « El Juli » signait au 5ème une faena presque exceptionnelle après une démonstration de pundonor, d’orgueil, dans sa volonté de répondre à Alberto López Simón qui, lors d’un quite à la cape, avait dessiné un farol genoux en terre du meilleur effet et des chicuelinas moins bien achevées mais qui avaient reçus une belle ovation. Piqué au vif, « El Juli », au centre de la piste citait le domingo hernández pour un magistral quite par quatre zapopinas, que l’on devrait désormais appeler lopecinas, pour leur parfait « timing » , le toro parfaitement pris dans les volutes de la cape, le tout paraphé de deux remates en demie-véroniques qui avaient un air de chicuelinas. La place debout saluait ce moment intense et beau à la fois. Deux bonnes paires de banderilles de Javier Ambel et brindis de « El Juli » au public. Ce toro, coureur au début, sans être vraiment piqué, s’animait aux banderilles et ne devait plus quitter la muleta de « El Juli » avec la vertu de s’ « ouvrir » en fins de passes, mieux à gauche moins bien à droite avec la tendance de lever la tête dans les remates. Toutefois la faena était de qualité avec martinetes ou molinetes de fins de série à gauche. Deux pinchazos dont le deuxième profond et , fulminant. L’oreille est concédée. « El Juli » avait réalisé une faena courte sans grand relief à son premier du fait du manque d’entrain du garcichico de néanmoins 550 kg. affichés, noblote qui perdait parfois l’équilibre de ses pattes avant. Une série en redondo - 2 ou 3 tours ? - et à la mise à mort avec pinchazo en sortant de la suerte et une entière avec une petite bronca au président pour ne pas accorder l’oreille. La faena au 3ème était primée de l’oreille durant laquelle « El Juli » était accroché sans mal et, fâché, il reprenait la muleta affirmant sa maîtrise « obligeant » un toro de charge courte, réservé et faible des pattes antérieures. Naturelles puissantes mais sans éclat et l’estocade avec un petit « julipié ». Le toreo de « El Juli » semble avoir gagné en naturel, sans les postures forcées pour engager, conduire et allonger à l’extrême les charges des toros, qui peut-être aujourd’hui ne le permettaient pas.
Alberto López Simón sortait lui aussi en triomphe avec son aîné après avoir mérité une oreille à son deuxième, un sobrero de garcigrande (mouchoir vert précédent) sans codicia ni fixité à la cape, qui comme ses congénères recevait des picotazos, il tombait même à la sortie du cheval. Commencée au centre de la piste, à genou, en redondos, la faena montait d’un ton et López Simón, vertical, toréait par naturelles, liées et remate de la passe de poitrine, pieds cloués au sol. Le toro noblote, suivait le leurre dans des passes bien ciselées, dosantinas à genou (de nouveau…). Le toro ne permettait plus de passes. Alberto tentait une mise à mort a recibir sans raison et tuait enfin d’une estocade légèrement desprendida. Les deux autres faenas, dans le style particulier d’Alberto Simón, avec des hauts et des bas dans l’exécution des passes, souvent terminées collées à l’arrière train du toro, qui entachaient les séries, sans grande émotion, sans doute par l’insipidité des toros. La dernière faena, après celle de « EL Juli » semblait mécanique – elle l’était ! – avec beaucoup de passes sans relief, dans le même terrain du tercio certes, mais dépourvue de l’émotion que transmet habituellement le torero de Barajas.
Les toros de Garcigrande et de Domingo Hernández sans brio, les forces justes dans un tercio de piques lamentable, souvent de seules piqûres, ne transmettaient pas l’émotion des mansos de la veille : c’est un comble !!
Julián López « El Juli » : ovation après forte pétition d’oreille; un oreille ; une oreille. Alberto López Simón : un oreille ; un avis et une oreille ; silence.
Georges Marcillac