Valencia 19 mars 2025 - Dernière de Feria – Le mano a mano réduit à un seul combattant et Roman triomphe à la suite de la dramatique cogida de Borja Jiménez. Notable corrida de La Quinta.

La corrida de la San José – Fête des Pères en Espagne – sommet des Fallas de Valence annonçait  un mano a mano avec Román Collado, valencien et Borja Jiménez, d’Espartinas (Séville) qui entamait sa temporada de confirmation de torero d’élite. Malheureusement, la cogida de Borja Jiménez, survenue à la mise à mort du deuxième toro de La Quinta jettait à la fois l’effroi et le doute d’un accident fatal, transformait cette corrida en la lidia d’un seul homme et un nouveau défi inespéré pour le local “Román” La corrida voyait la présence du Roi Felipe VI venu pour rendre hommage aux victimes de la Dana, catastrophe qui avait anéanti plusieurs communes autour de Valence. En barrera, le roi était entouré de l’ancien matador Luis Francisco Esplà et d’Antonio Bañuelos, président de la RUCTL – Royal Unión de Criadores de Toros de Lidia. Les toros de La Quinta, d’encaste Santa Coloma, permettaient à “Román” de montrer une maturité et sa faculté d’adaptation aux circonstances.

Borja Jiménez recevait, le 2ème, un toro estrecho de sienes mais d’encornure respectable, astifino, qui passait dans la cape en sautillant mais qui finissait “humilié”, de charge courte mais plus régulière après avoir été fixé. “Tito “ Sandoval piquait bien à la première puya sans trop insister et portait un picotazo à la deuxième. Dès les premières passes de muleta, le toro cessait de baisser la tête, et dans un “cite” de la droite, il venait tout droit sur le torero qui l’évitait. C’était un avertissement bien que le vent pouvait en être aussi la cause, soulevant la muleta. Tout au long de la faena, le toro passait et ne semblait pas se livrer, la tête suelta ou en l’air en sortant des passes (défaut congénital des santa-coloma). La faena était bougée, peut-être le toro insuffisamment piqué et ahormado. Malgré cela Borja Jiménez tenait le toro dans sa muleta. Pour la mise à mort, il se profilait en suerte naturelle et se produisait la cogida, le toro n’ayant pas répondu au cite par le bas de la muleta. Borja restait des secondes interminables, secoué au niveau de la poitrine, accroché à la pointe des cornes. Román mettait à mort ce toro dans le silence de la plaza…

“Román”, à son premier, dessinait de bonnes véroniques et une larga de remate. Ce toro de belle présentation était légèrement piqué par “Puchano”. Borja Jiménez, à son tour dans un quite par chicuelinas, profitait du bon tranco du toro. La faena entamée de la droite, “citant” de loin, avec l’inconvénient du vent, gérait bien cette belle charge qui, peu à peu, serait réduite principalement dans des naturelles. Des manoletinas sur la fin et l’épée atravesada, ressortant par le flanc gauche du toro éliminait l’octroi d’une oreille méritée. Le 3ème, brocho, acucharado de cornes, montrait quelque faiblesse de pattes dans les premiers capotazos et demarrait allègrement vers le cheval pour une pique ratée et la deuxième, sans appuyer le picador après un nouveau bel élan du toro. À la muleta. lors du tanteo, le toro se serrait de la corne gauche, il finissait par baisser la tête dans des derechazos mais sortait en dehors de sa trajectoire naturelle pour une passe de poitrine finalement réalisée, de la main gauche, sans se corriger, bien "Román"! Plus compactes les séries suivantes de la droite, le vent contrariant et empêchant les naturelles, ceci ajouté la tendance du toro de serrer sur la corne gauche. La bonne estocade, contraire, n’avait pas d’effet immédiat, le toro brave, se defendant à la mort sous deux descabellos. Un avis.

Le 4ème, un cárdeno typique des santa-coloma, cornes large ouvertes, ne s’”ouvrait” pas dans les premières véroniques et se retournait par le bas pour une nouvelle charge. Au cheval la deuxième pique était plus appuyée. Bons capotazos de Javier Gómez Escorial et diana floreada de la trompette de “El Soro” annonciatrice d’une bonne faena en raison des qualités du toro. Sur la gauche, charge vive de ce dernier à la muleta, entregado, qui permettait de longues passes de la droite, tête basse dans le drap terminées malheureusement par un desarme… Sur la gauche, en passes plus courtes, deux séries de naturelles de "Román", franchement bonnes, la deuxième bien “templée”. Des ayudados por alto et passe de poitrine pour terminer une faena mesurée mais intense, toujours avec le désagrément du vent. Curieusement, ce toro brave, grattait le sol, en position de recevoir une bonne estocade, bien placée. Toro bouche fermée. Une oreille!

Après quelques doutes quant à la réapparition de Borja Jiménez, improbable à mon avis, “Román” reprenait les trastos pour le 5ème et à genoux, pour une larga cambiada. Debout, des véroniques et chicuelinas. Le toro avait une belle charge, plus mesurée que celle des toros précédents. La première pique bien placée et la deuxième un peu plus en arrière, mais soutenue après une longue charge du toro que “Román” avait placé au centre de la piste! Ovation au picador"Puchano".  Le tercio de banderilles assuré par Juan Sierra et Luis Blázquez complétaient ce bon début de la lidia et bon comportement du toro nommé  “Famoso” nº35, 555 kg. né en octubre 2020. Saluts des deux banderilleros. Après le brindis au public, les ayudados por alto et la trincherilla du meilleur goût, montraient la disposition de “Roman" et la bonne condition du toro. Malgré le vent, des derechazos, cite lointain, des naturelles, temple, et passes de poitrine. Une nouvelle série  de la droite faisait découvrir la supposée indifférence du toro santa-coloma en fins de passes, la tête en l’air. Une passe circulaire en redondo, peut-être pour éviter cela. Une estocade en suerte contraire de ¾ de lame tendida et le toro s’écroulait, bouche fermée, sans puntilla. Une oreille et vuelta al toro. “Román” invitait son picador Francisco Ponz “Puchano”, lui ausi de Valence, à effectuer la vuelta al ruedo en sa compagnie . Beau geste. Le 6ème, manso détonnait du reste de la corrida. Joli quite par chicuelinas “sentidas” de Victor Manuel Blázquez le sobresaliente, valenciano aussi et frère du banderillero Luis Blázquez. Rien de bien notable de ce toro qui fuyait la muleta… des pinchazos – le coeur n’y était plus - un avis. FIN de cette corrida à laquelle "Román" montrait une nouvelle dimension de son toreo dans des conditions adverses, son sens de la responsabilité, surmontant aussi l'émotion  après la terrible cogida de Borja Jiménez.

Georges Marcillac