La Plaza de Las Ventas enregistrait une pauvre entrée – 1/3 de sa capacité - en ce jour de Pâques alors que Séville, aujourd’hui, Málaga et Arles, hier, affichaient “complet” pour des cartels de vedettes. Pourquoi pas à Madrid? Une politique de prix d’entrées et une affiche de deuxième catégorie, en sont sans doute la raison… Une corrida qui annonçait deux lots de trois toros dans la ligne d’un desafío de ganaderías - qui n’en était pas un – apportait la confirmation que certains élevages ne possèdent pas, en cette saison post-pandémie, de corridas complètes pour Madrid… Le rabais sur le cachet des toreros et celui des toros compensaient peut-être aussi la baisse attendue du nombre de spectateurs.
Curro Díaz était chargé de confirmer l’alternative à Borja Jiménez en présence de José Garrido. Les toros de l’élevage de El Tajo (sortis 1er et 4ème), un de Enrique Martín Arranz (sorti 3ème) remplacé successivement par deux sobreros, l’un de Martín Lorca, l’autre de Escribano Martín, enfin trois de Las Ramblas donc en 2ème, 5ème et 6ème positions) formaient cette corrida hétéroclite. Tous eurent des comportements irréguliers, parfois à la limite de l’équilibre au terme des suertes de varas très dosées. Le deuxième sobrero fut celui qui offrait le moins de possibilités, le 6ème pas plus, les deux pour José Garrido …
Matador de toros depuis 2015, Borja Jiménez confirmait son alternative avec un toro jabonero de El Tajo de l’élevage de José Miguel Arroyo “Joselito”, de nom “Deseadito” de 520 kg, né en février 2019. C’est avec ce toro que le torero d’Espartinas – fief d’”Espartaco”, présent dans la callejón – affichait des qualités indéniables signant une faena de passes de bonne facture mais sans la réponse d’un animal éteint. Le tanteo, par une succession de passes des deux mains, de la grâce, gagnant du terrain, fut une belle entrée en la matière. Par son placement, se croisant pour des naturelles, de face pour les derniers derechazos, Borja dominait son sujet mais, à l’épée, il terminait par une estocade basse, tendida et un descabello. Le 5ème montrait tout au long de sa présence dans la piste, une attitude et un caractère changeants, bravito mais pas très costaud du train avant, d’une charge descompuesta. Intelligemment, Borja Jiménez le citait de loin pour profiter de l’inertie de charge pour ensuite le toréer de plus près par des passes courtes et suaves bien acceptées par ce toro auquel il portait une estocade entière, bien placée, précédée d’un pinchazo.
Curro Diaz ravissait ses partisans - ils sont nombreux à Madrid - dans deux faenas où il exprimait, d’abord une volonté de surmonter les qualités incertaines de ses deux opposants, qui, ensuite et malgré cela, lui permettaient de réaliser un toreo technique et élégant à la fois. Son premier ne se livrait pas, sans “humilier”. Après un tanteo de la droite, les passes enchaînées, “templées” amélioraient sensiblement la charge de ce toro. Sur la gauche, le toro “protestait” et n’allait pas à la fin des naturelles. Des passes par le bas précédaient une spectaculaire estocade entière, l’animal s`écroulait près des tablas. C’est au 4ème, un toro de 508 kg. sans les protestations du T7??, des cornes et belles hechuras, que Curro Díaz déployait tout son talent, en produisant une faena inégale dans la successions des passes, mais quelles passes! à un toro qui se déplaçait parfois à la limite de la perte d’équilibre. Les naturelles se succédaient, de face, compas semi-ouvert ou pieds joints, une à une, mais quelle classe! De la belle ouvrage! Deux estocades portées avec décision mais atravesadas faisaient retomber l’embellie et la déception était grande aussi bien pour le torero que pour le public conquis jusqu’alors.
José Garrido n’était pas bien servi par le sorteo. Son premier, invalide, le premier sobrero avec une pointe de mansedumbre ne tenait pas le coup dès ses contacts avec la cape ou la première pique, le second sobrero de 603 kg, après un timide châtiment aux piques, donnait des hachazos en terminaison des passes de la droite, A gauche, sans ce défaut mais aussi sans transmission, ce toro daignait à suivre la muleta, la faena perdait de l’intérêt… L’épée entrait entière après une demi-estocade horizontale et un pinchazo. Le 6ème, sans qu’il fut arrêté à la cape, allait au cheval al relance et recevait une pique bien placée au second assaut. Ensuite après un tercio de banderilles erratique - à l'exception d'une bonne paire de José Chacón - ce toro ne montrait aucune envie de combattre, tardo, il sortait des passes de la droite la tête en l’air et tendait, peu à peu, vers les planches. Pour la forme, José Garrido terminait par des manoletinas qui n’apportaient rien à cette faena insipide. L’estocade desprendida était le point final de cette corrida marquée seulement de l’empreinte du bon torero qu’est Curro Díaz et la bonne impresión qu’avait produite Borja Jiménez. Mais sans toros…
Curro Diaz: saluts; un avis, saluts et grande ovation. Borja Jiménez; silence; saluts. José Garrido: un avis et silence; silence. Fernando del Toro de la cuadrilla de Borja Jiménez bien aux banderilles au 1er. José Chacón applaudi pour une seule paire de banderilles au 6ème. Bonne température 23 °C. 8.164 spectateurs. |
Georges Marcillac
Photos: Plaza 1