Juan de Castilla reçoit l’ovation de Las Ventas en reconnaissance de sa présence, après avoir toréé à Vic-Fezensac le matin même, réussissant à rejoindre la capitale espagnole par vol depuis Toulouse, à temps pour honorer son contrat. Bien lui en a pris puisqu’il a été à l’origine d’une prestation sérieuse reconnue par le public de Madrid.
Le lot de Miura, imposant, a été l’objet de protestations parce que certains exemplaires arboraient des têtes de toros jeunes (tous avaient 4 ans). Le manque de force des toros a affecté le déroulement de la corrida et aussi, pour plusieurs, l’absence de race et de qualité dans l’embestida.
Les premiers capotazos de Rafael Rubio "Rafaelillo", au premier de la corrida, sont défensifs car la charge est courte et violente. Le Miura pousse tête à mi-hauteur sous une pique trasera. La seconde pique, en place, est prise en donnant des coups de tête. Rafaelillo doit gérer la faiblesse du bicho, son absence de celo et de charge. Trois pinchazos, entière et descabello. Silence.
Rafaelillo affronte son second de Miura qui est plus intéressé de sauter au callejón qu’à charge à la cape. Il pousse tête haute sous une pique arrière puis répète l’exercice brièvement. Juan de Castilla réalise un quite téméraire par gaoneras. Le toro trébuche dès le tanteo. Rafaelillo "cite" de loin à droite et voyant que le toro charge sur l’extérieur sans vice, il tente de dessiner des muletazos corps relaché. Le bicho est tardo et le matador insiste de la même manière sur les deux cornes. Entière desprendida portée avec habilité. Palmas et salut.
Le premier de Juan de Castilla charge comme un J-P Domecq jusqu’à ce qu’il trébuche et coupe, de ce fait, la trajectoire. Il met les reins contre le peto et sort de l’épreuve en titubant. Les tendidos grondent pendant le second picotazo. Brindis TV. Le matador "cite" de loin, depuis le centre, faisant confiance à la charge découverte à la cape. Il enchaîne plusieurs séries de derechazos en maintenant ses distances. Le toro répond avec fébrilité. À gauche, plusieurs tentatives gèrent avec application le calamocheo et la faiblesse du toro. Très engagé, le torero exécute une série liée, manquant de proximité, qui lui vaut les olés de Las Ventas. La suivante, un ton en dessous, marque la fin du trasteo. Deux pinchazos, une épée basse avec avis et descabello. Palmas majoritaires et salut.
Le cinquième saute rapidement et facilement par deux fois au callejón. Il charge la cape en sautant aussi. Le toro pousse sous une carioca puis une seconde fois avec moins de classe. J. E. Colombo abandonne son idée de quite lorsque le toro montre sa fébrilité. Brindis au public. Depuis le centre, Juan de Castilla présente la muleta à droite. La charge irrégulière du bicho ne décourage pas le Colombien de vouloir bien faire. Particulièrement à gauche où il se place sur la trajectoire et "cite" avec sérieux, en accompagnant la charge jusqu’au bout, en plusieurs séries. Entière caída portée avec conviction. Applaudissements et salut.
Jesús Enrique Colombo reçoit son premier par des lances mobiles terminés par deux recortes inopportuns. L’entrega du toro sous la pique est punie par une carioca. Quite de Colombo par chicuelinas, sur la corne gauche, brusques en envoyant la charge vers l’extérieur. La seconde pique est formelle. Le matador se charge du second tiers. Le toro tire un derrote au visage de Colombo dans la première paire de banderilles de poder a poder réunie dans le berceau. Dans la seconde paire, tout aussi exposée, la corne du Miura touche le chaleco. Avec détermination le matador exécute la troisième paire avec la même détermination en terminant avec la tête de l’animal face à la sienne au moment de la réunion. L’ensemble valant ovation et salut du matador. Brindis au public. Colombo "cite" à droite depuis le centre. Après hésitation, le toro galope pour des derechazos dans lesquels il tire un hachazo à chaque sortie de passe. Plusieurs séries droitières mettent en valeur l’entrega du torero et la mobilité du Miura. Le trasteo à gauche s’avère plus compliqué et est alterné avec la droite dans le style défensif appliqué depuis le début du trasteo. Quelques adornos avant un bajonazo et avis. Plusieurs descabellos. Silence.
Le dernier Miura impose le respect par son volume et ses deux poignards dirigés vers le haut. La brega vers le centre par J.E. Colombo canalise une charge peu propice au toreo de cape. Le tiers de piques est marqué par la faiblesse du Miura. Le quite du matador est réalisé par chicuelinas anciennes soit de navarras et demi-véronique. Rehiletes en main le Vénézuelien manque sa première pose à cornes passées. La seconde réalisée à toute vitesse doit éviter la tête relevée du toro. La troisième, dans un cite à genoux, connait d’abord un passage en faux par recorte et finalement une pose défectueuse. Le torero pose une quatrième paire dont la pose s’avère compliquée compte-tenu de la tête haute du toro. Muleta dans la main droite le tanteo accentue les défauts déjà marqués du toro. Celui-ci charge les derechazos avec des coups de tête et charges irrégulières. Le trasteo est mécanique. À gauche, les défauts vus à droite sont identiques ou pires. De retour à droite. les fins de charges sont devenus encore plus brusques. Le torero se justifie avec une insistance perçue de diverses manières par le conclave. Pinchazo et entière exposée lorsque sonne l’avis. Silence.
René Arneodau