Lagunajanda a envoyé un lot de présentation variée avec certains exemplaires en dessous du niveau des arènes et d’autres conformes à leurs critères. La caractéristique commune des Lagunajanda fut la mansedumbre, la noblesse, le manque de classe et, pour certains, la mobilité. Dans ces conditions, tout dépendait du degré d’engagement des toreros et de leur volonté de prendre des risques pour triompher. Aucun des trois ne l’a fait.
Le toro de la confirmation d'alternative d’Alejandro Peñaranda, juste de présentation pour Madrid, corniapretado, charge à la cape avec une faiblesse du train arrière. Il permet néanmoins au matador une série de véroniques à rayon large. Le toro sort rapidement de sa première confrontation aux piques. Le second combat, bref également, est vif et engagé de la part du bicho. Quite d’Escribano par delantales et demi-véronique. Au second tiers, une banderille reste plantée dans un emplacement de pique. Alejandro Peñaranda confirme l’alternative de la main de Manuel Escribano, en présence de Joselito Adame, face à "Vinatero" de Lagunajanda n°51, né en 11/19, pesant 545 kg. Brindis au public. En terrain du tercio du tendido 7, le matador "cite" pour un tanteo esthétique, par le haut. Le bicho est tardo. Au centre, les derechazos terminés par un cambio de mano et un pase de pecho sont "templés". Les trajectoires en arc de cercle gardent des distances de sécurité. Après la seconde tanda, le torero prend la gauche. La charge et la série sont molles. Le retour à droite est laborieux. Des manoletinas et ortinas sont réalisées sans l'épée "Veneguina". Demi-lame trasera, tendida, caída et plusieurs descabellos. Silence.
Manuel Escribano reçoit son premier avec douceur par véroniques alternées pieds joints et compas ouvert. Le picador tombe de sa selle, ce qui fait que la première pique n’est pas significative. La seconde pique voit le toro combattre tête haute. Quite de Joselito Adame par chicuelinas brusques et demi-véronique. Escribano se charge de poser les rehiletes. Le premier passage est un cuarteo facile vers le centre, le second un poder a poder vers les mêmes terrains et le dernier un poder a poder cité au centre, constituant la paire la plus réussie des trois. Après la cérémonie de retour des trastos, Escribano démarre avec des ayudados par le haut suivis de remates dans lesquels le toro apparaît s’être épuisé avec des charges vives et désordonnées. Le matador alterne les cornes et réussit à canaliser les charges à droite. Sur l’autre corne, il y parvient dans deux naturelles grâce à un placement al hilo. Il le reproduit encore mieux dans une autre série à gauche, cette fois en se croisant entre les muletazos. La charge a des qualités exploitables. Les derechazos suivants marquent cependant le moment où le toro, non dominé, capitule et la faena prend fin. Bajonazo en passant au large. Avis et une autre épée contraire, trasera et tendida. Palmas au toro. Silence.
Le second de Manuel Escribano est reçu à puerta gayola par une larga cambiada de rodillas, soutenant une charge incertaine, suivie par un travail de cape sur le passage distrait du bicho. Ce dernier fuit en manso dès qu’il sent la puya en trois passages. C’est au quatrième qu’il daigne combattre, sans classe. Les banderilles posées par le matador sont un poder a poder à tête passée, un quiebro al violín en profitant des terrains de querencia et une paire au quiebro en citant assis sur l’estribo. Brindis au public. Au centre, Escribano réalise un double péndulo dans une introduction légère. Les derechazos canalisent, en deux séries, une charge longue sans appuyer sur la trajectoire. Le toro tire des derrotes, non contrôlés, en fin de muletazos. À gauche, les trajectoires en ligne et les derrotes en fin de passes ne permettent pas de ligazón. Escribano insiste à droite en terrain rapproché et l’on voit que les défauts de charge pouvaient être maîtrisés. Entière trasera et tendida. Palmas pour le matador.
Le premier de Joselito Adame passe avec entrain dans les véroniques pieds joints du Mexicain qui se sent plus à l’aise sur la corne gauche. Le tercio de varas est bref, en trois passages, le toro n’étant pratiquement pas piqué. Bref quite du jeune Peñaranda. Brindis au public. La faena de l’Hidrocálido débute par un tanteo suivi de derechazos sur le voyage. Deux séries à droite, depuis une position marginale, ne font pas réagir les tendidos. Sur la corne gauche, les muletazos en ligne et al hilo ont le même effet. Les droitières liées en rond, totalement fuera de cacho, divisent les opinions. Pinchazo en tentative de recibir. Deux pinchazos, dont un hondo. Descabellos. Applaudissements au toro. Silence.
Le cinquième permet au Mexicain de bonnes véroniques en gagnant du terrain, avec demi-véronique de remate. Le toro est manso au cheval, évitant la pique et sortant vite de la première rencontre. Il fait ensuite la toupie en parallèle au peto au second passage. Une dernière pique médiocre voit enfin le toro batailler, sans classe. Quite d’Adame par chicuelinas alternées avec espaldina et remate. Brindis personnel. Les ayudados por alto avec le pase de pecho et pase del desprecio n’ont que peu d’écho sur les gradins. Une série courte à droite est suivie d’une autre fuera de cacho, tirant les passes de fuera para dentro. Sur la corne gauche, le calamocheo et les retours du toro sont canalisés en deuxième partie de série. À droite, le même concept que pour les premiers derechazos donne un résultat similaire. La charge est maintenant courte et décomposée, ce qui dénature une dernière tentative gauchère. Celle à droite présente, enfin, la qualité d’être ajustée. Entière légèrement trasera. Avis. Silence.
Alejandro Peñaranda reçoit le dernier de Lagunajanda par une brega pour le fixer. Le toro pousse sous la première pique et subit la seconde. Les premiers doblones, suivis de derechazos, mettent en évidence une charge nonchalante. Le matador, hors trajectoire, tire des muletazos droitiers entrecoupés par des fléchissements du bicho. À gauche, en deux temps, les naturelles accélérées sont tirées en ligne. Le toreo marginal, c’est-à-dire fuera de cacho, transmet au public car lié. En introduisant un cambio dorsal et un cambio de mano, le jeune torero recueille les applaudissements du public. Les derniers muletazos, donnés sur jambe fléchie et les ayudados vers les tablas, sont le meilleur de la faena. Entière caída. Forte pétition d'oreille non accordée. Vuelta.
René Arneodau.