Mais sans la race et la classe qui auraient permis aux trois diestros - pas matadors, aujourd’hui – le moindre succès. Fernando Robleño, Javier Cortés et Francisco José Espada affrontaient un lot de cinqueños, corpulents, de belle allure et encornure, accueillis à leur sortie du toril par des murmures de surprise et applaudissements mais, pour la plupart, sifflés à l’arrastre. Des toros poussés – engraissés - pour figurer à l’affiche de Madrid mais qui avaient laissés à la finca d’Orgaz (Tolède) une part de leur héritage de El Ventorillo avec des signes de mansedumbre aussi. Quant aux trois toreros dont le style et performances passées ont les faveurs des aficionados madriilènes, ils ne purent développer des faenas complètes, de surcroît, mal terminées à l’épée. Fernando Robleño, vétéran de plus de vingt ans d’alternative est depuis quelques mois le nouveau directeur de l’Ecole Taurine “Yiyo” de Madrid. Le premier de El Montecillo sortait au pas et ne passait pas les premiers capotazos de réception avant de prendre deux piques, coups de tête dans le peto, sans pousser ensuite avant de s’échapper de la rencontre. Aux banderilles, César del Puerto prenait l’avantage sur la course du toro, vive de façon surprenante, limitée jusqu’alors. Les doblones du début de faena avaient pour but d’assujettir l’animal à la muleta. Les charges étaient descompuestas sur la droite, courtes sur la gauche et les retours vifs à mi-hauteur. Deux séries de derechazos, sans lié, mais de bonne facture, profitaient d’une charge raccourcie et ramolie. Fernando Robleño s’était donné pour peu de résultat. Il portait une demi-estocade desprendida. Au 4ème, un toro veleto, presque cornivuelto, les premières véroniques donnaient quelque espoir, vite démenti, par la suerte de varas erratique et peu appuyée par la faute du toro et… du picador de service. La faena se déroulait à peu près sur le même schéma que la précédente, à la différence que le toro cessait de charger malgré un tanteo technique et de beaux gestes sans continuité dans des derechazos. Des pinchazos. Un avis.
Javier Cortés recevait un toro de robe variée, carbonero, capirote, botinero, de 612 kg, de belle allure à la sortie du toril. Dans son passage à la cape, il jouait de la corne et il était fortement châtié à la première pique et sortait suelto de la deuxième. Arrêté aux banderilles, il chargeait fort mais restait court dans la muleta et il relevait la tête en fin de passes. La faena presque exclusivement de la gauche, laissait par-ci, par-là des naturelles profondes, muleta basse, les dernières de face mais le toro sortait de chacune d’entre elles sans intention de répéter. De la torería, des attitudes dans le positionnement, dans des remates mais tout ceci s’effaçait à l’épée, des pinchazos, une entière quand sonnait un avis. Le 5ème se distinguait par des cornes relevées dont la courbure vers l’intérieur n’enlevait en rien leur aspect menaçant. Il évitait le contact avec le picador, il recevait néanmoins des puyas en arrière et chargeait les capes, topón. Ayant accusé ce châtiment, il s’effondrait mais tenait debout le reste de la faena sans pour autant charger clairement - embestida descompuesta –. Ensuite Javier Cortés dessinait des derechazos courts mais stylisés, à mi-hauteur, certains de face, et remates toreros. Demi-estocade, tendida, croisée.
Francisco José Espada n’est pas du genre de ces toreros qui toréent à distance, en allongeant de bras, penchés en avant, dans des attitudes peu élégantes mais confortables. Au contraire, et c’est là l’exagération, il reste au plus près des cornes et donne cette impression, parfois vérifiée, d'un danger imminent. C’est toute l’attraction que produit ce torero de Fuenlabrada (Madrid), qui torée peu - 5 corridas en 2023 - mais qui se donne corps et âme. Son premier, le plus léger du lot - 596 kg – de bonnes hechuras, passait bien dans des véroniques mais s’échappait aussitôt. La pique était rapidement levée et le toro se déplaçait bien aux banderilles. Les statuaires du début de faena, liées à un remate de la gauche, d’un meilleur effet, ne cachaient pas cette impression de danger qui ne cessait tout au long du trasteo de muleta. Ce toro n’était pas réduit et la faena désordonnée réservait par intermittence des moments de bon toreo par le bas à droite, de l’émotion pour un cambio dans le dos. Les manoletinas finales , un remate en naturelle et passe de poitrine soulevaient , à juste titre, le public enthousiasmé par tant de sincérité et… d’accrochage inhérent. A l’épée une demi-estocade tendida, suivie d’une estocade entière décisive mais l’ensemble ne justifiait aucun prix malgré une légère pétition d’oreille. Le 6ème jettait ses pattes avant dans les premiers capotazos. il semblait faible sur pattes mais ne chutait pas et au contraire c’est le toro qui paraissait avoir les meilleures conditions pour assurer, par la suite, un bon tercio de banderilles et faena de muleta. Le toreo en redondo, très serré, se terminait par une bousculade avec la passe de poitrine. Des naturelles, une isolée très “templée”. Un changement de main pour de nouvelles naturelles, et une nouvelle passe de poitrine étaient le point culminant de la faena. Le public exultait. Deux pinchazos et un trois-quatrs de lame faisaient retomber l’enthousisme. Sonnait un avis.
Fernando Robleño: applaudissements; un avis et silence. Javier Cortés: un avis et silence; silence. Francisco José Espada: saluts; un avis et saluts. Dans les cuadrillas, c’est celle de Francisco José Espada qui se distinguait: José Luis Triviño ensuite J.A. Aponte “Candelas” et Pascual Mellinas, aux banderilles, saluaient au 6ème. 18.329 spectateurs. Georges Marcillac Photos Plaza1 |