La première novillada du cycle de la San Isidro revêtait un intérêt certain en la présence des novillos de Los Maños – encaste Santa Coloma. Quant aux novilleros, dont c’était le premier paseíllo à Las Ventas, ils n’ont pas démérité mais face à des novillos de cet encaste, leur manque d’expérience ce faisait sentir. Le Mexicain Arturo Gilio parut plus à l’aise, Carlos Dominguez de Badajoz et Guillermo García Pulido de l’École Taurine « Yiyo » de Madrid montraient des envies de toréer sans toujours s’adapter aux conditions des novillos. Ceux-ci, se promenaient dès leur sortie du toril, avant de se fixer dans les capes ou bien charger, parfois sans préparation, les chevaux. On relevait des faiblesses des pattes avant, parfois aussi dues à une « humiliation » exagérée. Des pointes de mansedumbre du 3ème et la plupart avaient de belles charges en début de faenas pour ensuite baisser de régime à mesure que se prolongeaient ces mêmes faenas (défaut constant des novilleros) et sonnaient plusieurs avis… Le 4ème, presque un toro de 522 kg, chargeait la cavalerie dans une rencontre brutale, poussait jusqu’à la barrière sur le point de provoquer la chute, le picador soutenant la poussée. Ce novillo donnait l’impression de « chercher la bagarre ». C’est le 6ème qui, aussi de poids respectable - 527 kg.- , attaquait le cheval et désarçonnait le picador qui chutait devant le novillo, rapidement écarté. Seuls les picadors étaient applaudis lorsqu’ils s’étaient tirés d’affaire, sinon leurs prestations ne furent pas toujours exemplaires.
Carlos Domínguez touchait, en premier, un novillo maigrichon, qui mettait bien la tête dans la cape mais fléchissait des pattes avant. Après s´être centré, il pouvait à loisir toréer des deux mains ce novillo infatigable, « templer » ses passes, aidé par le rythme d’une charge continue. De trop en faire, le novillero, son opposant ne répétait plus ses charges desquelles il sortait la tête en l’air (caractéristique des produits de Santa Coloma), distrait et gazapeando. Le novillo était applaudi à l’arrastre après qu’il fut estoqué d’une demi-lame poussée en deux temps. Le 4ème sortait à toute allure et fonçait sur le cheval comme indiqué ci-dessus. Sa charge droite permettait la répétition des naturelles du début de faena. La ligazón n’était pas toujours obtenue et la faena perdait d’intensité car le novillo, lui-même, baissait son rythme initial, s’arrêtait, la tête relevée. Un trois-quarts d’épée très arrière, croisée, était suivi de X descabellos…
Arturo Gilio de Torreón (Mexique) lieu de naissance prédestiné, fils de matador et installé en Espagne, recevait par des gaoneras et une caleserina son premier novillo sans aucune préparation avec pour conséquence une imparfaite exécution… La charge descompuesta au deuxième tiers et la distraction du novillo ne laissaient présager rien de bon. Mais une fois fixé par un tanteo anodin, celui-ci développait une qualité de charge surprenante dont profitait le jeune Mexicain par des derechazos liés, le corps très décollé de la trajectoire du bicho (495 kg. accueilli par des murmures de réprobation pour des hechuras limites). La répétition des charges « humiliées », « faisant l’avion », était spectaculaire et occultait la facilité et presque le trucage des passes. Les bernadinas, une très serrée, les passes de poitrine et la bonne exécution de la suerte de matar, entrant droit, estocade trasera, incitaient le public indulgent à demander l’oreille… non accordée. Le 5ème était mis en valeur par le capoteo de Fernando del Toro (autre nom prédestiné). Arturo Gilio, mieux centré et toréant cette fois-ci sans truquer, s’appliquait dans ses passes de la droite, en « templant » parfois les charges suaves pas toujours constantes du novillo. Le novillero prenait plaisir à toréer et allongeait la faena… des manoletinas pour terminer et dans un desplante, le novillo cueillait Arturo Gilio, la corne droite transperçait le mollet de la jambe gauche ; il était emporté à l’infirmerie. Carlos Domínguez devait porter l’estocade.
Guillermo García Pulido recevait le novillo, sorti 3ème qui avait donné des signes de manso, par de bonnes véroniques profondes et stylisées et la demie. Le tanteo préliminaire « templé » et la réponse aux « cites » lointains faisaient oublier la mauvaise impression du début bien que le comportement du novillo ne fut pas parfait : il se retournait et se désalignait en fin de passes sans permettre leur répétition. Le novillero n’arrivait pas à résoudre cette difficulté. Une estocade tombée et d’effet rapide recevait des applaudissements. Au 6ème, celui qui avait provoqué la chute du picador, le Madrilène devait toréer à mi-hauteur pour éviter les fléchissements répétés des antérieurs de ce novillo qui avait pourtant montré de la force durant le tercio de varas. La faena se déroulait avec l’inconvénient ajouté de l’arrêt du novillo en fins de passes. La tentative de toréer sur la corne gauche échouait. La reprise de la main droite, et tout en fin de faena, permettait la seule série complète, liée mais avec chute du novillo sous la passe de poitrine. Encore une fois, la faena était prolongée sans raison ! En conclusion : un pinchazo et une estocade entière très en arrière et évidemment un avis.
Carlos Domínguez : un avis et silence aux deux. Arturo Gilio : un avis et saluts ; blessé. Guillermo García Pulido : silence ; un avis et applaudissements. Se distinguaient à la brega Fernando del Toro et aux banderilles Fernando Sánchez de la cuadrilla d’Arturo Gilio, aux banderilles Jesús Diez « Fini » de la cuadrilla de Carlos Domínguez. Arturo Gilio souffre d’une cornada de 25 cm de trajectoire entrée et sortie du 1/3 inférieur de la jambe gauche. Dirigé à la Clinica de la Fraternidad. Pronostic : grave. 14.272 spectateurs. |
Georges Marcillac
Photos Plaza 1