La corrida de El Pilar, imposante de présentation, des poids de 533 kg à 599 kg, des cornes et divers comportements, offrait un magnifique toro d’ouverture, cinqueño, de nom « Bastardero », pour Javier Cortés alors que par la suite les autres pensionnaires de Moises Fraile allaient a menos en qualité sans pour autant entacher la réputation de cet élevage d’origine J. P. Domecq par Aldeanueva car Francisco José Espada sut profiter des vertus et des défauts de ses opposants alors que Tomás Campos touchait les deux plus compliqués et ne se trouvait pas à l’aise pour surmonter leurs difficultés.
Javier Cortés. d’entrée, dessinait des véroniques à un toro qui ne se déplaçait pas avec codicia mais qui allait montrer à la faena de muleta les qualités de charges qu’il n’avait pas non plus exhibées sous les deux piques règlementaires. Après les doblones préliminaires, le toro s’animait et la faena se déroulait principalement sur la corne droite. Les derechazos profonds se succédaient avec le remate de la passe de poitrine, le tout dans un minimum de terrain, avec ligazón des passes et transmission du toro. Le passage à gauche était moins réussi, le toro se retournait et les passes écourtées. La reprise sur la droite s’imposait et la faena remontait en intensité, le toro n’ayant pas perdu son allure et rythme de charge. Les derechazos, de face, pieds joints étaient suivis en remate du pase de la firma et passe de poitrine. Faena sérieuse, classique sans concession au public, Javier Cortés avait toréé avec un plaisir manifeste mais aussi en mesurant les belles charges du toro, brave. L’estocade dans un premier temps décisive tardait à faire son effet et sonnait un avis. Malgré cela, l’oreille était demandée et concédée. Le 4ème ne présentait pas le même comportement que son congénère, sans fixité à la cape il était placé à distance du picador Oscar Bernal qui se distinguait dans cette suerte de varas, notamment à la deuxième rencontre, lançant en avant la pique et plaçant la puya dans un geste parfait et précis. Ovation. Le quite de Javier Cortés par chicuelinas et le tercio de banderilles faisaient découvrir la noblesse du toro bien que celle-ci se convertissait en mollesse ou insipidité malgré les bonnes attitudes du torero. La faena entamée par statuaires et trincherilla ravissaient les connaisseurs, les passes des deux mains, de belle facture, étaient isolées. La mise à mort était laborieuse avec pinchazos et une estocade entière après qu’ait sonné un avis.
Le sorteo de favorisait pas Tomás Campos. Ses deux toros n’étaient absolument pas propices à quelque mise en valeur des bonnes intentions que le torero avait sans doute lors du paseillo. A mesure que se succédaient les différentes séquences de la lidia, on découvrait que ces toros n’allaient pas lui offrir de grandes options : le 2ème, de charges descompuestas, « humiliait » certes, mais relevait la tête en fins de passes ou perdait l’équilibre. Une seule série de la droite, complète, liée, était fêtée par le public… mais le résultat global de la faena était plutôt négatif car il n’y avait pas eu l’entente nécessaire du torero avec ce toro irrégulier. Un bajonazo – il faut penser involontaire – s’ajoutait à la mauvaise impression qu’avait produit cette pauvre actuación. Le 5ème, ne valait guère mieux, ni à la cape ni à la muleta, sans que fut visible la capacité du torero de maîtriser les lacunes de ce toro qui recevait aussi un infâme sartenazo presque dans les flancs provoquant une mort subite.
Francisco José Espada, au contraire, savait s’accommoder des défauts sinon des difficultés de son premier d’El Pilar, un toro d’imposant trapío, fuyard, avec lequel le jeu de cape était impossible. Rien à la pique, le toro démarrait au dernier moment lors de la pose des banderilles où brillaient Iván García et Jesús Arruga, deux professionnels très demandés. Dans la muleta, ce toro passait en sautillant et avait tendance à fuir, à rajarse. Là, Francisco José se plantait au centre du ruedo et obligeait le toro à charger et surtout à répéter ses charges, laissant la muleta sous le museau du mansurrón. Venaient plusieurs séries de la sorte, en passes de la droite, courtes, en redondo. Il forçait aussi des naturelles de même style avant de se mettre dans les cornes, il tirait ensuite des manoletinas avant de porter une estocade contraire sans passer la corne ! Les « puristes » n’appréciaient pas l’effort et la lucidité du torero de Fuenlabrada et le gratifiaient de sifflets alors qu’une oreille était demandée… Le dernier de 599 kg, aussi mansurrón, se montrait indifférent sans pousser sous les piques – David Prados le picador n’eut pas à faire un grand effort. La faena commençait par des derechazos et la chute de l’animal en fin de muletazos.. Francisco José « consentait » les charges rétives, obligeait donc le toro à charger, en « templant ». Une série de la gauche, de bonnes naturelles fut la dernière car, avec ce toro désormais arrêté, on assistait à un arrimón inconsistant et pour comble d’affreuses luquecinas totalement déplacées. Un trois-quarts d’épée ne mettait pas le point final à cette faena mal terminée car suivaient un grand nombre de descabellos. Tout ceci gâchait l’image favorable qu’avait produite Francisco José Espada surtout au 3ème nommé « Resistente » !!
Javier Cortés : un avis et une oreille ; un avis et silence. Tomás Campos : deux avis et silence; un avis et silence. Francisco José Espada : saluts; deux avis et silence. Des cuadrillas on remarquait Iván García et Jesús Arruga aux banderilles ; Antonio Molina à la brega et Oscar Bernal picador aux ordres de Javier Cortés. |
Georges Marcillac
Photos Plaza 1