La traditionnelle corrida de Bienfaisance, sans le roi Felipe VI aux Canaries pour le Jour des Forces Armées, à répondu à toutes les attentes des aficionados qui souhaitaient voir se rééditer le toreo sans égal que Morante de la Puebla nous avait offert le dernier 28 mai. Aujourd’hui, il a comblé tous les espoirs des morantistes, et autres plus jeunes, qui peut-être le découvrent seulement maintenant, car il a pu couper une oreille à chacun de ses toros de Juan Pedro Domecq et ainsi sortir par la Grande Porte de Las Ventas pour la première fois de sa déjà longue carrière. Cet exploit avait une grande valeur pour le torero de La Puebla del Río qui a eu l’honneur de la sortie par la Porte du Prince de la Maestranza en deux occasions mais jamais, jusqu’à ce jour à Madrid. Voilà qui est fait. Ses deux jeunes compagnons de cartel avaient la dure tâche d’être comparés au maestro, à leur corps défendant, car ils avaient accepté leur participation pour cette emblématique corrida madrilène. Fernando Adrián coupait une oreille à son premier et Borja Jiménez repartait bredouille. Les toros de Juan Pedro Domecq donnaient une autre image que celle, pitoyable, du 24 mai et l’on peut dire que 3 ou 4 ont “servi”…
Morante de la Puebla donnait des séries discontinues de véroniques et chicuelinas à son premier, dans son style inimitable, posé, sûr de ses gestes comptés, et cette douceur ou temple qu’il imprime à son jeu de cape. Olés! Le toro était sorti du toril d’une allure détachée mais finalement il chargeait lentement dont profitait Fernando Adrián dans un quite par gaoneras entre les deux piques poussés alternativement des deux cornes à la première (carioca) et bien prise mais vite relevée, la seconde. La faena débutait par des statuaires, une naturelle, un pase ayudado por alto, un molinete invertido, le tout terminé par une passe de poitrine. Il semblait que ce toro était du goût du maestro et il le confirmait en dessinant des derechazos liés, d’autres en redondo avec une facilité, une cadence à nul autres pareilles. Une trincherilla pour placer le toro pour les naturelles serrées… le corps vertical dans une gestuelle naturelle, un petit pas pour enchaîner la suivante et la passe de poitrine libératoire tout en courbe. L’épée tombait en el hoyo de las agujas: une estocade d’école. Une seule oreille était concédée et la vuelta al ruedo triomphale. Malgré ses 582 kg et des hechuras moins harmonieuses que le premier, le 4ème était protesté à sa sortie et les quolibets ne cessaient durant la faena alors que Morante travaillait son toro pour en faire un parfait collaborateur (certains feraient mieux de parfaire leur éducation taurine et leur éducation tout court!). Morante prenait la direction de la lidia et mettait en suerte son toro pour les piques (cela montrait ses intentions ou son intuition) alors que ce toro semblait avoir mal encaissé le châtiment?. La charge de cet exemplaire n’était pas la meilleure dans le tanteo par doblones et ayudados. A mi-hauteur, Morante entreprenait ce toro pour lui servir des derechazos d’abord, des naturelles - une d’elles absolument énorme de temple, de long trajet - ensuite et remate par la passe de poitrine ou le molinete et molinete invertido. Ovation, public debout. Là le toro avait “humillé” et oubliés les signes de faiblesse… L’estocade, de parfaite exécurtion tombait un peu plus que desprendida … mais l’ioreille était demandée et accordée. Morante en pleurs - un grande émotion partagée - recevait les embrassades et accolades de son équipe. Son rêve de triompher à Madrid venait de s’accomplir.
Fernando Adrián devait redorer son blason, lui habitué aux sorties a hombros de Las Ventas et qui restait sur une vuelta al ruedo le 16 mai et sur pas grand chose il y a une semaine. Son premier toro était accueilli par les protestations du public pour son manque de remate. De belles véroniques et la demie, du temple et profondeur, marquaient les intentions du Madrilène mais aussi la bonne réponse du toro. Suelto après chaque pique, dans un quite de Borja Jiménez par chicuelinas le JPD répétait une bonne charge qu’il conservait tout au long de la faena que Fernando Adrián n’arrivait pas à tempérer. Donc beaucoup de passes, charges vives et toro “humilié”, incomplètement expoitées. Des bernadinas pour terminer et une estocade trasera, contraire. Pétition d’oreille et octroi de l’oreille. D’entrée, le 5ème recevait trois faroles de rodillas, debout des delantales, chicuelina et revolera inversée. Cette débauche de lances, de bon aloi, précédait un bon tercio de varas crédité au picador Alberto Sandoval, le toro poussant, mettant les reins, après un bon démarrage et une bonne charge, tête basse dans le peto. Un cambio por la espalda, un passe de poitrine formaient le début de la faena de muleta mais le toro fléchissait des pattes avant. Le reste de la faena se déroulait avec des arrêts du toro pour, ensuite, des charges de classe et répétées. Une pointe de caste le faisait se défendre et mettait en difficulté le torero. Mais ce toro finissait exténué et un malencontreux metisaca en terminait avec cette faena qui aurait mérité mieux.
Borja Jiménez dessinait de bonnes véroniques, chargeant la suerte et gagnant du terrain vers le centre du ruedo. Ce toro, le 3ème, recevait un châtiment mesuré - la deuxième pique seulement pointée – perdait ses forces au fur et à mesure de la faena, faite de passes une à une. Borja devait tirer du toro alors que la faena s’allongéait et n’avait plus de sens pas plus qu’un desplante face aux cornes du toro arrêté. Des pinchazos et le toro s’affaissait avant même de recevoir l’estocade. Un avis. Le coup de puntilla s’imposait. Le 6ème recevait deux bonnes piques de “Tito” Sandoval qui à son tour recevait l’ovation du public. Ce toro dont la charge tardait à se definir, répondait violemment,“humilié”, mais peu à peu, il ne terminait les passes desparramando la vista, visiblement sans l’entrega nécessaire et les forces justes pour que la faena prenne un certain intérêt. Et ce malgré les efforts de Borja Jiménez qui, dans un mauvais jour à l’épée, multipliait les pinchazos pour, enfin, porter une estocade basse.
Morante de la Puebla: une oreille aux deux. Fernando Adrián: une oreille; silence. Borja Jiménez: silence aux deux. On remarquait les hommes à pied de la cuadrilla de Morante: Curro Javier et João Ferreira. Les trois premiers toros furent dédiés à l’Infante Elena, représentant la famille royale à une barrera du T1. Nouveau no-hay-billetes pour 22.964 entrées payantes. |
Georges Marcillac