Cette corrida de transition réunissait des toros de Torrehandilla et de Torreherberos (4ème et 6ème) provenant de toros de Jandilla depuis 2002 et 2005 respectivement et 2009, année de leur présentation à Madrid en novillada. Corrida de transition après l’annulation de celle d’hier en raison de l’état de la piste après de nouvelles pluies diluviennes et les suivantes où reviendront quelques figuras. Les toreros eux, considérés de deuxième catégorie, n’eurent vraiment pas l’occasion de briller. On attendait en particulier Álvaro Lorenzo après sa sortie a hombros de Las Ventas, le jour de Pâques et Daniel Luque qui en était à son deuxième passage. Le troisième larron, David Galván, élève de Francisco Ruiz Miguel, bien qu’il eut coupé une oreille en 2016, restait pratiquement inédit avec à son «palmarès» deux blessures dont une grave. Quant aux toros, leur retour à Madrid s’est soldé par un échec pour leur propriétaire qui pourtant devait les avoir réservés pour Madrid car les six étaient des cinqueños. C’est peut-être pour cela aussi que leur âge mûr leur faisait exhiber des armures imposantes avec en contrepartie une réserve et un manque de caste qui ruinaient les espoirs des toreros. Le 6ème, un jabonero sucio, pour sa faiblesse après les deux premiers tercios, était renvoyé aux corrales et remplacé par un sobrero de Virgen María (du propriétaire français Jean Marie Raymond) qui ne relevait pas le niveau de cette corrida ennuyeuse.
Le premier avait une charge paresseuse et relevait la tête en fins de muletazos avec les accrochages obligatoires mais prenant la mesure de ce toro, Daniel Luque parvenait à corriger ce défaut, la muleta, basse. Une série de la droite avec molinete et passe de poitrine démontraient le métier et expérience du torero. Encouragé par ce résultat, Daniel Luque terminait sa faena par les passes de son invention, les luquesinas les pieds rivés au sol. Un pinchazo hondo et un descabello suffisaient pour occire l’animal. Le 4ème, moins armé mais de meilleures hechuras, prenait deux piques selon le même modèle : en arrière, coups de tête dans le peto et sortie suelto. Sans force, sans charge, une chute totale – costalada – rendaient inutiles la moindre passe de muleta. On pourrait émettre l’hypothèse d’un châtiment exagéré aux piques pour justifier ce comportement néfaste. Un pinchazo et une estocade tombée mettait fin au supplice du toro et… des spectateurs.
David Galván, très actif à la cape dans les quites - chicuelinas compas ouvert – ne trouvait pas de répondant de ses toros poussifs. À la muleta, il tentait d’imprimer à ses passes une aura artistique sans grand effet. Le 5ème se déplaçait mieux que ses congénères et cela engageait le torero de San Fernando (Cadix) à entamer sa faena par une tobalina, deux statuaires et pases del desprecio, le tout dans un minimum de terrain. Seulement ce toro avait une charge sans «humilier» et obligeait David Galván à tenir la muleta à mi-hauteur pour, avec bonheur, lier les passes.
Les naturelles sans continuité, de tracé court étaient la constatation de la baisse de régime de l’animal. Un arrimón et des bernadinas, pour donner le change, précédaient une estocade entière légèrement contraire. Le 2ème, ne se départait pas d’un coup de tête final à chacun de ses passages dans la muleta de David Galván qui lui portait un coup d’épée (littéralement) pour une estocade entière.
Álvaro Lorenzo n’était pas très heureux avec ses toros, pas plus que ses compagnons de cartel, et réalisait des faenas appliquées mais sans transcendance. Le 3ème donnait un derrote en fin de passes – un desarme - et s’il lui baissait la muleta, le toro perdait pied ou clouait ses cornes dans le sable, pour finir arrêté, sans envie, sans caste. Un bajonazo n’arrangeait rien à cette faena décousue. Au 6ème, le sobrero de Virgen María, pour ne pas changer, le T7 protestait. Il est vrai que le toro n’affichait pas un physique extraordinaire, raisonnablement armé, veleto de la corne droite, sans culata (arrière-train), il allait violemment au cheval mais sortait suelto de la première rencontre et recevait une pique arrière à la seconde. La faena de muleta commencée de la main gauche, Álvaro Lorenzo tirait des naturelles rectilignes et passes de poitrine vers l’extérieur. La charge courte du toro se réduisait au fil des séries. De jolis gestes, changement de main, «temple» mais cela ne suffisait pas pour briller totalement. Des ayudados por alto et por bajo pour bien finir. Un avis sonnait entre un pinchazo et une estocade entière desprendida.
Daniel Luque : un avis et silence ; silence. David Galván : saluts ; silence. Álvaro Lorenzo : un aviis et silence; un avis et saluts?
Georges Marcillac