La troisième et dernière novillada du cycle isidril annonçait un lot de novillos de La Ventana del Puerto un des fers de la famille Fraile de Salamanque, celui-ci d’origine Juan Pedro Domecq passant par Aldeanueva et El Pilar. Les trois premiers novillos laissaient penser, par leurs hechuras, qu’ils étaient bien dans la lignée de el-pilar alors que les suivants n’avaient pas le même type, tant par leur squelette, armures et comportement et affichaient des poids au-dessus des 500 kg. et proviendraient d’un croisement d’origine différente. Evidemment seul le propriétaire pourrait confirmer cette impression. Toujours est-il que ces trois premiers permettaient de laisser entrevoir les qualités ou lacunes des novilleros en présence : Alejandro Marcos de Salamanque, Joaquín Galdos, péruvien de Lima et Juan de Castilla, colombien de Medellín qui remplaçait le jeune de la famille Adame, Luis David, blessé la semaine dernière à Las Ventas.
Alejandro Marcos, torero classique, laissait passer une occasion de briller plus qu’il ne le faisait car son novillo, le meilleur de l’après-midi, un colorado bien fait, avait une charge « humiliée », tête basse dans les capes au début, allait au cheval la tête haute dans le peto, mais retrouvait son « humiliation » durant la faena de muleta. Prompt au cite, codicioso, il débordait le novillero sur la droite pour s’assagir un peu plus à gauche et c’est sur cette corne qu’Alejandro Marcos réalisait l’essentiel de sa faena. Après que le novillero se fut centré, les naturelles courtes étaient enchaînées, bien que lors d’un arrêt en milieu de passe, le novillo le soulève sans dommage. Les séries étaient plus accélérées sur la fin et lors de la mise en suerte pour la mise à mort, le novillo de « Huracán » fonçait sur Alejandro Marcos et, de plein-fouet, c’était la voltereta avec une bien mauvaise chute. Relevé groggy, il était emporté à l’infirmerie dont il sortait aussitôt pour estoquer son novillo d’un estoconazo avec un petit saut. L’oreille était demandée mais non concédée à juste titre et la seule récompense était la vuelta. Le 4ème novillo, costaud, fuyard au cheval, donnait de la tête dans les capes et protestait dans la muleta, il n’avait pas une charge constante et à la fin s’arrêtait. Après des passes de tanteo élégantes, il n’y avait pratiquement pas de faena. Plusieurs pinchazos, une estocade entière et un descabello mettaient à une prestation incomplète.
Joaquín Galdós ne sut pas profiter de son premier novillo et paraissait bien conformiste du sort qui était le sien. Bien reçu à la cape, de belles chicuelinas dans un quite, mal piqué, ce novillo, de charges claires, était toréé d’une façon avantageuse, décollé, utilisant à notre avis trop le pico de la muleta ce qui enlevait évidemment l’intérêt à la faena. Le 5ème se déplaçait mais sa course d’allées et venues dans les capes révélait une certaine mansedumbre caractérisée aussi face au picador, entrant fort pour sortir rebrincado ou donnant de la tête dans le peto. A la muleta il n’y avait pas grand-chose à faire car le novillo s’arrêtait. A la mort, les deux fois, l’épée tombait basse et plus que basse, la deuxième…
Juan de Castilla est un torero intéressant qui se dépense à la cape – un quite par cordobinas et remate par larga cambiada à genoux ! au novillo de Galdós – et à la muleta, il sait s’adapter aux conditions de ses opposants.
A son premier, coureur mais de charge vive, il réussissait à le fixer et le citant à bonne distance toréait en redondo sur la droite, moins bien sur la corne gauche. A la fin le novillo sortait de la suerte… Deux pinchazos et une estocade faisaient baisser la tension. Au 6ème, un novillo sérieux mais feo de hechuras, haut sur pattes, de 528 kg, cornes pointées devant, mansote, tête en l’air et sans charge au cheval, Juan de Castilla sut s’adapter aux changements d’attitude du novillo. Le novillo baissait la tête dans la muleta dès les premiers derechazos, presque « faisant l’avion ». Sur la gauche il semblait faiblir mais le colombien insistait et restait ferme devant ces changements d’une série à l’autre. Course saccadée dans la muleta, le novillo faisait mine de s’échapper vers les barrières. Malheureusement le public semblait déconnecté du travail sérieux de Juan de Castilla. Ses bernardinas serrées étaient même protestées ! Arrimón final avant de porter un pinchazo et un estocade tombée. Juan de Castiila s’était comporté comme un novillero à Madrid sans la reconnaissance du public.
Alejandro Marcos : un avis et tour de piste. Joaquín Galdós : silence aux deux. Juan de Castilla : un avis et silence aux deux.
Georges Marcillac