Le lot de Fuente Ymbro, impecablement présenté, à l’exception des cornes terminées en bolitas, comme toutes les corridas de la feria, a eu un comportement contrasté qui pouvait faire douter si celui-ci était dû au manque de classe des quadrupèdes ou à l’incapacité des toreros à maîtriser leurs charges. Le temps venteux, un jour de plus, et la pluie menaçante, ont affecté le déroulement des combats et probablement la psychologie du public.
Adrián de Torres, substitut de "El Fandi" convalescent, reçoit son premier par véroniques appliquées, avec colada du toro sur la corne droite. L’animal donne des indices de mansedumbre, mais pousse allègrement le cheval sous un bonne première pique de Juan Bernal. Le quite par chicuelinas ajustées, tout en cherchant l’hilo, finit en volteretón sur cette corne droite dont le matador devait se méfier. Le toro se retourne de loin, mais timidement, au cheval. Quite de Juan Leal qui exécute des tafalleras, toutes sur la corne gauche. Brindis tv. Superbe début de faena stoïque par estatuarios. Aux tercios De Torres "cite" le toro, qui se trouve en tablas, pour des derechazos brouillons très serrés. Poursuivant à droite, il reste al hilo et se fait mettre en difficulté par le calamocheo qu’il ne contrôle pas. Le passage à gauche est incomplet car les naturelles sont terminées par le haut. La série suivante sur la même corne n’est pas plus réussie. Le toro n’est pas dominé. Le retour à droite le confirme et lorsque une nouvelle voltereta violente survient. Le public proteste l’insistance du torero. Sans idée, celui-ci envisage de donner des manoletinas auxquelles il renonce et il interrompt les naturelles de face entamées. Avis. Un recibir de grande vertu technique et d’engagement laisse une entière légèrement de coté. Pétition d’oreille appuyée mais non accordée et vuelta al ruedo fêtée.
Le second FY d’Adrián de Torres saute pattes en avant dans la cape. Le toro ne termine pas ses charges. Le bicho s’emploie brièvement au cheval. Le quite par gaoneras du matador expriment plus son envie que ses qualités techniques ou artistiques. La seconde pique est trasera, tout comme la première, et brève. Curro Javier salue avec José Antonio Prestel, après une prestation supérieure dans les deux paires posées. Brindis au public. Le début de faena est à l’avantage du toro qui soudain tombe de tout son long au sol. Relevé il charge avec fougue et aussi un calamocheo que le matador, mal placé, ne contrôle nullement. À gauche, la position est meilleure mais la muleta est tout autant accrochée dans les muletazos donnés un par un. La suite à droite, terminant les derechezos main haute, est brusque et accrochée. Rien n’y fait, le torero n’arrive pas à dominer la charge du FY, ni à gauche, ni à droite. Pinchazo lorsque sonne l’avis. Entière en place.
Juan Leal doit se contenter de bregar son premier adversaire qui manque d’agressivité et freine dans les lances. Le toro pousse avec vivacité lors de la première pique dans un combat qui va a menos. La seconde pique n’a pas du tout de la même intensité. Le quite de Leo Valadez par chicuelinas, sur la corne droite, est mobile et terminé par revolera sur l’autre corne. Marco Leal salue au second tiers pour des rehiletes plus spectaculaires qu’orthodoxes. Brindis au public. Dans los medios, à genoux, le matador cite à droite puis renonce lorsque le toro ne répond pas. Il exécute les passes envisagées précédemment, le long des tablas, puis debout en position marginale, il torée por fuera. La première séries droitière est interrompue , la suivante est basée sur des toques por fuera tellement exagérés qu’ils renvoient le toro sur le torero. Vient alors un arrimón inefficace. Le passage à gauche est avorté car à ce stade le bicho n’a plus de charge. Une estocade en sautant vers l’extérieur, le plus loin possible, laisse en place un bajonazo infâme. Descabello. Silence.
Le second de Juan Leal met son matador en difficulté à la cape. Le toro pousse sous carioca au premier passage et s’emploie aussi lors de la seconde pique. Leo Valadez entre en quite par demi-faroles enchaînés avec caleserinas et revolera. Leal répond par gaoneras volontaires et imparfaites, terminées aussi en revolera. Brindis au public. À genoux, au centre, Leal donne un cambio por la espalda puis des derechazos, durant lesquels il doit se relever rapidement. Les derechazos suivants exhibent une tendance à être fuera de cacho et à citer vers l’extérieur. Sur ces bases, il est difficile d’élaborer un trasteo qui vaille à Madrid. Les naturelles suivent le même chemin. Leal cherche ensuite l’effet avec des dosantinas et la proximité des cornes. Curieusement c’est à ce stade qu’il réalise quelques naturelles de meilleure qualité. Cette prestation pueblerina divise les opinions. Quelques manoletinas terminent l’exhibition. Entrée a matar en sautant, et en couvrant la tête, ce qui déclenche un derrote et une forte voltereta. Reste une demi-lame trasera et tendida. Palmas pour les deux protagonistes.
Leo Valadez exécute deux delantales, une cordobina et une revolera aisés à son premier opposant. Mal piqué, le toro combat par à coups lors de la première pique en carioca. Le Mexicain réalise un quite par crinolinas. La seconde pique est brève. Brindis au public. Le début de trasteo est exécuté par toreo par le haut sur jambe fléchie d’abord, puis debout. À droite, la première série mélange accrochage de muleta avec des muletazos réussis. La série suivante est également brouillonne mais plait au public. La suite gauchère ne domine pas la tête mobile. Ensuite les derechazos donnés al hilo, en deux séries, et un toque ferme, permettent de lier deux séries meilleures et néanmoins marginales. Les manoletinas donnée à genoux enflamment les gradins et encore plus l’estocade en entrant droit avec voltereta. Une oreille pour une faena qui a eu la vertu d’aller a más et d’être terminée par une estocade supérieure. Applaudissements au toro.
Leo Valadez doit gérer la mansedumbre du sixième qui évite la cape une fois sur deux et fuit à la querencia. Excellente piques d’Alberto Sandoval à cet animal qui pousse d’abord avant de se dégonfler. Valadez réalise un quite par zapopinas qui mettent le public en ébullition. Au second tiers, le toro a une tendance à chercher les barrières. Brindis tv. Les passes par le haut de début se transforment en tanteo pour aller aux tercios. Les derechazos sont interrompus par un agenouillement du bicho. Les charges s’accompagnent de calamocheo et sautillements. Le FY ne veut pas charger et Valadez se rapproche pour donner des toques marqués qui déclenchent des charges réticentes. Les naturelles forcées sont isolées et citées dans les cornes. Entière desprendida portée avec entraga. L’effet est rapide. Ovation.
René Arneodau