Mont-de-Marsan – 20 juillet 2022 – 1ère de La Madeleine – Gros succès de Daniel Luque (3 oreilles) – Maestría de Diego Urdiales (une oreille) – Décevante corrida de Victoriano del Río.

La première de La Madeleine offrait une affiche attractive car les toros de Victoriano del Río avaient jusqu’à ce jour enregistré des résultats qui garantissaient le succès des toreros qui les affrontaient et satisfaisaient en général les aficionados par leur présence et bravoure. Ceux d’aujourd’hui, disparates de hechuras, parfois de forces limitées, décevaient, ò combien, quant à leur comportement en piste. Les trois derniers avaient cinq ans mais leur physique ne traduisait aucunement la différence d’âge avec les trois premiers…Tout le mérite revenait aux matadors qui réussissaient à se mettre en valeur face à des toros dont il fallait tirer la « substantifique moelle » si toutefois cette « moelle » existait. Je veux parler de Daniel Luque et de Diego Urdiales qui, chacun dans son registre, parvenaient à construire des faenas à force de volonté et technique. Le chef de cartel, Antonio Ferrera se heurtait à deux victoriano-del-río avec lesquels il ne pouvait déployer son toreo baroque.

Daniel Luque, le triomphateur de l’après-midi, montrait une assurance telle qu’il construisait sa première faena de muleta, sans tanteo, les pieds rivés au sol pour des passes par le haut et un trincherazo qui donnaient l’impression que, dès lors, ce toro était à sa merci. Ce dernier, tardo puis de démarrages brusques au deuxième tiers, ne semblait guère se prêter a priori à un toreo posé  et d’apparence facile. Daniel Luque dirigeait avec aplomb les charges courtes du toro, l’obligeant à répéter dans un minimum d’espace, sans corriger lui-même sa position. Une passe circulaire inversée était suivie par des naturelles en redondo, le corps vertical, et la passe de poitrine. Toujours dans un minimum de terrain et au plus près des cornes, des luquecinas, valeureuses terminaient cette faena très technique. L’engagement à la mise à mort avait pour conséquence une estocade arrière qui en quelques secondes roulait le toro. Deux oreilles étaient la récompense pour cette faena surprenante d’autorité et maîtrise. Le 6ème était accueilli par des véroniques exécutées jambe pliée pour canaliser une charge vive mais courte qui par la suite allait se révéler irrégulière, et cabeceo dans la muleta. Les passes égrenées à mi-hauteur étaient censées éviter le fléchissement des pattes avant du toro qui avait reçu, et pour cause, un châtiment modéré – c’est un euphémisme - à la pique. La faena n’était qu’une succession de passes isolées, résultats d’un arrimón, le tout terminé par une estocade dans la croix, d’effet immédiat. Une oreille.

                                     

Diego Urdiales signait une belle faena au 5ème, suelto dès les premières véroniques dont la vertu fut, justement de le garder dans la cape. Ces passes, de belles factures, n´étaient pas tracées dans le même terrain mais profitaient de la mobilité du toro. Cette qualité engageait Diego de dédier sa faena au public. Des passes aidées par le haut et le bas testaient les charges de ce toro toujours enclin à sortir de la muleta mais qui finalement était assujetti au leurre par des naturelles. Les « cites »  à moyenne distance, auxquels le noble toro, répondait, avaient pour but de profiter de l’inertie de sa charge pour ensuite lier les passes. Mais il fallait aller au-devant du toro car il avait tendance à s’échapper de la suerte. Le style de Diego Urdiales et la qualité des passes compensaient parfois  le manque de lié. Une dernière série, plus compacte celle-ci, de la droite, obligeait l’animal qui finalement capitulait et se dirigeait vers les planches. L’estocade desprendida et un descabello mettaient fin à la belle ouvrage, à l’effort de bien faire et d’y parvenir. Une oreille. Ceci venait effacer la frustration d’une faena inexistante à un toro imprésentable, le 2ème, de surcroît, rajado dès les premiers muletazos, sans la possibilité de le sortir des tablas et qui devait être mis à mort de quelque manière qui soit…

Antonio Ferrera ne pouvait quasiment rien faire avec ses deux opposants. Au sorteo, son équipe avait exigé que le toro de meilleur trapío de la corrida, un spectaculaire sardo, fut le premier à fouler le sable des arènes du Plumaçon. Toujours porté à créer le spectacle, il avait invité de champion de France des écarteurs, Cyril Dunouau, à recevoir « Gorrión » ( esp : moineau…) dès sa sortie du toril. Ce préambule aurait pu mal se terminer car le landais se faisait prendre et repris au sol, il en sortait miraculeusement indemne. Grande frousse et seulement dégâts vestimentaires. Armé d’une horrible cape verte qu’il avait déjà troquée à Pampelune d’une autre, bleu électrique, Antonio Ferrera dessinait des véroniques à ce toro qui chargeait « humilié », sans grande codicia. Peu après, il plaçait ce toro près du burladero des toreros pour qu’il puisse traverser la piste et s’élancer vers le picador Antonio Prieto. C’était sans compter du peu de bravoure du victoriano, qui s’élançait à petite vitesse, secouait la cavalerie et provoquait une chute monumentale en ayant soulevé le cheval par le poitrail. Par la suite, le toro essoufflé avançait avec peine et ne permettait rien de brillant. Rajado, il recevait un pinchazo et un descabello. Avec le 4ème, Ferrera ne fut faire guère mieux. Après un brindis au public ? la faena ne menait à rien, ce toro se freinait dans la muleta, fléchissait du train avant ou donnait un hachazo en fins de passes. Un nouveau pinchazo croisé et un descabello suffisaient pour en finir avec ce bestiau.

                                      

Antonio Ferrera : silence ; sifflets. Diego Urdiales : silence ; un avis et une oreille. Daniel Luque : deux oreilles ; une oreille. Aux banderilles se distinguaient et saluaient Juan Contreras et Alberto Zayas, de la cuadrilla de Daniel Luque, au 6ème. On remarquait à la brega José Chacón Victor Hugo Saugar « Pirri »Raúl Caricol respectivement des cuadrillas à l’ordre des trois matadors. Bonne température et belle assistance de public sans atteindre le plein.

Georges Marcillac

Photos d'André Viard pour mundotoro.com

Ce contenu a été publié dans France, Georges Marcillac Escritos. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.