C’est sous la neige que s’est déroulée la première corrida de la Feria de San Blas de Valdemorillo. Un froid polaire avait malgré tout attiré pas mal de spectateurs de Madrid complétant ainsi l’assistance habituelle des habitants de ce village de l’extrême sud de la Sierra de Guadarrama. Pour ceux qui ne le sauraient pas, la Candelaria – ainsi se nomme la plaza de toros – est une arène couverte qui nous préservait ainsi des intempéries de ce début de février et nous permettait d’assister presque au chaud à l’ouverture de la saison taurine, en l’occurrence une novillada prometteuse avec des novillos de Montealto, de bonne réputation à Madrid, et un cartel de jeunes novilleros : Antonio Catalán «Toñete», Alejandro Gardel et Ángel Téllez, tous trois avec moins d’un an en novillada piquée. Malheureusement, les novillos de bonne présentation - les 5ème et 6ème avaient quasiment le poids et hechuras de toros d’âge - ne remplissaient pas leur contrat ou plutôt celui de leur propriétaire Agustín Montes. Le premier, playero de cornes, trapu et de moindre poids que ses congénères, se battait bien sous la pique pour ensuite s’ «endormir» sous le caparaçon et sortir distrait d’un unique contact avec la cavalerie. A la première paire de banderilles, ratée, le banderillero Agustín Serrano, était poursuivi et cueilli au vol, une mauvaise chute après un «soleil» le laissait inconscient au sol. Emporté à l’infirmerie, il était ensuite évacué vers un hôpital proche. Le second, de même style d’encornure, se décidait avec violence à charger dans la cape d’Alejandro Gardel mais après la première pique et une esquisse de quite par chicuelinas ses charges se réduisaient. Le 3ème, un joli exemplaire de novillo, court sur pattes, sortait aussi vivement du toril pour ensuite entrer dans la cape d’Ángel Téllez sans trop de brio et permettait un quite par gaoneras après une seule pique.
Le 4ème, un jabonero sucio, n’était pas aussi «joli» que le précédent, il en imposait toutefois autant par son pelage que par sa taille. Il entrait court dans la cape de «Toñete», se retournait vivement et «pesait» un peu sur la droite. Après la pique, il se réservait et offrait quelques difficultés aux banderilles mais le banderillero local, «Tito» Robledo, devait saluer après deux paires valeureuses. Le 5ème était sardo de cape, de cornes épointées?, de 480 kg, n’avait pas un comportement exemplaire aux deux premiers tiers, et arrivait à la faena de muleta pratiquement arrêté… Le dernier, castaño de robe, l’allure d’un toro adulte, ne s’employait pas dans la cape d’Ángel Téllez et entrait trois fois au cheval - le réserve – pour en sortir aussitôt malgré une carioca et un châtiment répété sans doute exagéré. Son manque de fixité, charge erratique et désordonnée décontenançait une cuadrilla «prudente» clouant les banderilles, une à une a la media vuelta (sans se laisser voir et clouant par l’arrière du novillo)
La description des premiers tiers des six novillos ne laissait augurer rien de vraiment bon, novillos qui, dès le debut, montraient un manque de caste et de fond. Le plus mal loti fut Ángel Téllez car il ne pouvait rien tirer de ses deux opposants sans jus et sans caste, deux novillos qui s’arrêtaient, le dernier topón. Bien plus chanceux ou bien plus expérimenté - ce qui est le cas - «Toñete» toréait sans trop de continuité son premier novillo, distrait et peu coopérant dans des charges incomplètes. Il profitait de la mobilité du 4ème pour tracer des passes longues de la droite, une série liée, et des naturelles irrégulières dans leur forme et placement, le novillo finissant par s’arrêter. Des passes aidées par le haut - ayudados por alto – donnaient la seule note artistique de la soirée, avant un pinchazo et une estocade entière qui valaient à «Toñete» une oreille…
Alejandro Gardel entreprenait sa faena au cinquième, par des passes hautes gagnant du terrain vers le centre du ruedo et, par la suite, se cantonnait dans des séries de passes isolées, d’assez bonne facture sur la gauche mais sans le lié, que semblait demander le novillo si la muleta lui avait été présentée en continuité après chaque passe. Un trois-quarts de lame suffisait pour que lui soit concédée une oreille après cette faena mal interprétée. A son premier, après des doblones peu nécessaires, la faena de muleta se composait de passes une à une, le novillo restant court sur ses charges. Mise à mort laborieuse avec un grand nombre de descabellos.
Antonio Catalán « Toñete » : Saluts et une oreille. Alejandro Gardel: un avis et sifflets ; une oreille. Ángel Téllez : silence aux deux.
Georges Marcillac
Photos: Javier Arroyo - Aplausos.