En cette dernière semaine de la San Isidro, étaient annoncés des toros d’origine Santa Coloma, élevage prestigieux qui eut ses heures de gloire avec les figuras comme Luis Miguel Dominguín ou Antonio Bienvenida et plus récemment Paco Camino. Le lot d’aujourd’hui était complété par un exemplaire de San Martín, de même origine, de tout juste les quatre ans alors que les rehuelgas avaient tous les cinq ans bien sonnés, de poids divers allant de 532 kg (le 2ème) à 647 kg (le 5ème). Pourvus d’armures peu habituelles pour cet encaste, la corrida de Rehuelga offrait aux trois matadors de belles occasions de triompher bien que, souvent les difficultés qui leur sont propres – nécessité d’être "consentis" dans la muleta, retour rapide en fins de passes – mais aussi procurant des charges "humiliées" et lentes, exigeaient des toreros connaisseurs de ces caractéristiques et rodés à résoudre les problèmes cités plus haut. Fernando Robleño, Alberto Aguilar et Manuel Jesús Pérez Mota étaient les toreros qui complétaient le cartel. Tous les trois quittaient la plaza, le devoir accompli, sans le succès espéré, avec la reconnaissance mitigée du public, celui-ci ayant parfois pris fait et cause pour les toros. Tous les six allaient au cheval sans rechigner avec une mention spéciale au 5ème de nom « Liebre » !! avec trois assauts, longs et francs. Ce rehuelga recevait le prix de la vuelta al ruedo, sans doute une décision excessive et unilatérale du président alors qu'une autre vuelta était demandée aussi pour le 6ème, cette fois, non acceptée.
Fernando Robleño devait faire le plus d’efforts pour toreér son premier – celui de San Martín – un toro qui ne transmettait (au public) rien mais qui en imposait au torero par des écarts imprévus à moitié passes et terminant avisé de la corne droite. Des séries des deux côtés en maintenant une prudente distance dans l’exécution des passes. Sans tarder, il prenait l’épée pour deux pinchazos et une estocade entière. Le 4ème paraissait "endormi" aux piques pour enfin se "réveiller" aux banderilles. Durant la faena, au centre du ruedo, il démarrait fort à chaque cite, pour ensuite passer mollement dans la muleta et s’arrêter entre chaque passe. Curieusement, pour le préparer à la mort, Fernando Robleño le conduisait au niveau des rayas où le toro chargeait et même répétait à chaque sollicitation de la muleta… (on ne saura jamais si c’était, là, le terrain où le toro aurait développé des qualités occultées en los medios). Une estocade et plusieurs descabellos. Un avis.
Alberto Aguilar, qui avait dédié ses deux toros au public, profitait de leurs charges longues dans des cites à distance avec l’intention de lier les passes. Son premier répondait bien mais pour compenser une certaine faiblesse il avait une embestida descompuesta, charge irrégulière et il s’appuyait sur le côté gauche du torero l’obligeant à "rompre". Tout au début, au 5ème, dans un cite lointain, Alberto recevait un coup de corne sans dégât, ni corporel, ni vestimentaire, ce qui montrait la difficulté de déplacer et faire passer un toro de 647 kg. La faena était plus intéressante car Alberto Aguilar prenait confiance à mesure que le toro cessait de fléchir des antérieurs – sans doute conséquence des efforts prodigués lors des trois rencontres au cheval – pour enfin rester en position de lier les passes à un toro brave et noble, revigoré, qui répétait ses charges "humilié". Une bonne série de la gauche et des doblones "templés", en fin de faena, déclenchaient de belles ovations. Une estocade entière, efficace et rapide, invitait à demander l’oreille, mais la vuelta al ruedo décidée par le président laissait pour compte la prestation estimable d’Alberto Aguilar qui saluait depuis le tercio.
Pérez Mota, touchait les deux meilleurs toros propices à deux faenas qui n’eurent pas lieu. Le 3ème s’"ouvrait" dès les premières passes et la suite montrait un torero précautionneux, toréant trop avec les vuelos de la muleta (pico ?) donc décollé de la trajectoire du toro. La charge noble et rythmée de ce toro nommé "Perlasnegras" contrastait avec la position et mouvement du torero. Pérez Mota se jetait pour l’estocade, accroché au passage, après deux pinchazos. Le toro était applaudi à l’arrastre. Au 6ème, noir, cornivuelto, terciado, plutôt Ibarra (un origine ancienne de Santa Coloma), la faena mal construite et mal composée – dans le tercio au lieu des medios, interrompue et reprise – laissait voir toutes les qualités de charge répétée, tête basse, profonde, le torero perdant des pas pour enchaîner les passes, ceci nécessaire et adapté au début de la faena. Les naturelles étaient bien dessinées, les derechazos moins bien réussis. Après la velléité d’en finir, Pérez Mota instrumentait deux nouvelles séries et plaçait ensuite un pinchazo et une estocade légèrement croisée. Le toro recevait une belle ovation à l’arrastre alors que le matador, lui, écoutait applaudissements et sifflets.
De la cuadrilla de Pérez Mota, son frère Juan Contreras et Raúl Caricol saluaient aux banderilles, Raúl Ruiz de l’équipe d’Alberto Aguilar brillait à la brega.
Fernando Robleño : silence ; un avis et silence. Alberto Aguilar: silence et saluts; Pérez Mota : sifflets ; division d’opinion.
Georges Marcillac
merci Georges