Il y a peu de mots pour qualifier la corrida de Fuente Ymbro lidiée aujourd’hui à Plumaçon. Le bilan « toriste » est le suivant : quatre toros mansos déclarés, les quatre premiers, cherchant les barrières, fuyards, se désintéressant des capes et muletas, le 5ème tout juste vu « bon » par certains, sans classe ni bravoure, le 3ème du même acabit mais renvoyé au corral pour un problème de train arrière ( il n’y avait règlementairement pas de raison de le changer, surtout que l’ankylose parfois disparaît au cours de la lidia) et remplacé par le 6ème selon l’ordre du sorteo. Seul le sobrero sorti en sixième position fut un bon toro, brave, de qualité et classe véritablement, qui pourrait donner un minimum de satisfaction à l’éleveur Ricardo Gallardo. Par contre la présentation était exemplaire tant de trapío que des armures. Sans que les poids fussent affichés, il est sûr que pratiquement tous étaient au-dessus des 500 kg. Quant à leur comportement à la pique il y eut du bon et du mauvais. Par exemple, le manso premier allait trois fois au cheval - il ne faut pas confondre un contact avec le picador avec une pique placée et portée en bonne et due forme. La première pique fut la meilleure, les autres trompeuses par une belle charge suivie d’un picotazo… Le sixième, recevait une pique soutenue – longue ovation au picador - après une charge d’une trentaine de mètres, al relance, c’est-à-dire sans avoir été mis en suerte, il « remettait » cela et recevait une pique en deux temps dont il sortait suelto. On passera sous silence les autres séances piquées car elles révélaient toutes la mansedumbre déjà citée.
Diego Urdiales après s’être étiré à la cape à son premier, qui indiquait déjà une corne gauche assassine, ne pouvait donner une seule passe? de muleta sans que le toro s’échappât, il fallait même le poursuivre sans espoir de lui donner une passe digne de ce nom. Le quatrième, un toro de poids, recevait une seule pique, une seule paire de banderilles !! (pourquoi?) il se réservait, topón dans la muleta. De plus le vent gênait Diego Urdiales qui cherchait obstinément à faire passer ce toro qui avait mis le frein. Dans les deux cas, les mises à mort étaient expéditives, une estocade basse et deux pinchazos suivis d’une demie, respectivement.
Sébastien Castella coupait une oreille au 5ème, le seul toro castaño du lot, de hechuras qui plaisent aux toreros, fuyard à la cape, donnant des coups de tête dans l’étrier du picador et suelto, coureur dans tous les sens pendant le tercio de banderilles. Avec ce « matériel », le biterrois optait de dédier ce toro au public et le début de la faena, assis sur le marchepied de la barrera, confirmait sa volonté de triomphe qu’il concrétisait par des séries de passes presque exclusivement de la droite, indifférent à la mauvaise qualité de charge du toro - léger calamocheo – qui ne se livrait pas vraiment, maintenant la muleta sous le museau, toréant par derechazos liés d’abord, en redondos ensuite ne lui laissant aucun répit ni possibilité de fuir. Un volapié efficace mettait fin à la faena. A son premier, Sébastien Castella dut aller chercher le toro dans sa querencia et là, dans un espace limité réussissait à le garder dans la muleta, le faisant s’enrouler littéralement autour de sa taille et se libérant par la passe de poitrine ou celle du desprecio. Le redondo inversé - dosantina ou circular au Mexique - et un molinete brillant bouclaient la faena avant que ne soient portés un pinchazo et une estocade basse… Tout l’intérêt de la prestation de notre compatriote fut d’avoir montré une entrega et des capacités techniques de bon aloi devant des toros pas du tout propices au succès.
Iván Fandiño découvrait les vertus du sobrero – sans doute laissé pour compte au sorteo pour son poids, volume et armures respectables – dès les premières véroniques, un toro qui humiliait et répétait ses charges, qualité confirmée par son comportement au cheval et durant le tercio de banderilles où Iván García excellait et devait saluer. A genoux, pour commencer la faena, sur la droite en redondo et passe de poitrine. Ensuite les séries de derechazos, longs et templés, nous montraient Iván Fandiño sous son meilleur jour, maîtrise et placement face à un toro brave meilleur collaborateur du côté droit qu’à gauche où les naturelles n’étaient pas aussi liées ni bien dessinées. Les adornos par bernadinas, une en changeant au dernier moment le voyage, mettaient un peu d’émotion à ce trasteo méritoire et précédaient une estocade, se jetant sur le garrot. L’oreille demandée timidement au début était finalement accordée. Le cambio dans le dos, triplé, fut le début et le meilleur de la faena au 3ème car après ce toro « protestait » à chaque passe qu’Iván Fandiño tentait de lui donner, passes terminées par un derrote, bronca la charge et accrochage en perspective. Le manso, agressif celui-là, recevait un trois-quart de lame après un pinchazo.
Diego Urdiales : Silence aux deux. Sébastien Castella : saluts et oreille. Iván Fandiño : applaudissements ; un avis et une oreille.
Georges Marcillac