La corrida In Memoriam en l’honneur de Victorino Martín Andrés (1929-2017) ganadero du plus fameux élevage de toros braves des temps modernes fut couronnée avec bonheur par la Puerta Grande du Sévillan Borja Jiménez. Celui-ci coupait les deux oreilles du toro “Milhijas 109” courru en sixième position et sauvant ainsi une corrida qui jusqu’alors n’avait montré que des séquences-éclair des deux autres matadors du cartel Paco Ureña et Emilio de Justo. Les pensionnaires de Las Tiesas, bien dans le type Albaserrada, tous cinqueños, ne donnaient qu’un jeu varié avec les difficultés propres à cet encaste mais sans plus, plutôt édulcoré en réference aux alimañas du passé. Le toro “Milhijas” superbe de hechuras et de poids - 594 kg – fut brave développant des charges splendides dès les premiers capotazos jusqu’aux derniers muletazos de la faena terminée par une magnifique estocade. L’engouement suscité en fin de spectacle donnait lieu à l’envahissement du ruedo par de jeunes et moins jeunes aficionados pour finalement emporter a hombros Borja Jiménez et Victorino Martín García, l’actuel propriétaire de la ganadería, honneur sans doute exagéré pour ce dernier.
Borja Jiménez, héros du jour, recevait “Milhijas” par des véroniques, jambes semi-fléchies l’amenant ensuite au centre de la piste. Le toro s’élançait vers le cheval pour une pique de côté (protestations), la seconde étant mieux placée et ovation au picador Germán González. La cuadrilla - bonnes paires de banderilles de Vicene Varela - ménageait ce toro… La faena débutait par des naturelles que Borja dessinait avec aguante d’autant plus méritoires que la charge du toro ne permettait aucune hésitation, charge “humiliée”, répétée, s’ouvrant sans exagération mais la tête toujours par le bas. Une autre tanda de même intensité et la suivante demandaient un repositionnement du torero pour enchaîner les passes sous l’emprise de la fougue du toro. Sur la droite, les passes étaient longues moins rapprochées et le trasteo, à ce moment-là, moins compact. La série suivante, avec remate par molinete et passe de poitrine, le tout lié, rehaussait le niveau de la faena. Les passes par le bas, pour finir, du goût du public madrilène, un pase del desdén, précedaient une grande estocade. Un avis sonnait car le toro tardait, blessé mortellement, à s’effondrer. Les deux otreilles était accordées en raison de l’unanimité et enthousiasme du public. Mouchoir bleu pour le tour de piste de la dépouille du brave toro. A son premier, Borja Jiménez, devait gérer non seulement le passage du toro dans sa cape et muleta mais aussi la faiblesse du train arrière de l’animal – visible lors de la suerte de varas – et sa charge hésitante et incertaine. Il passait mieux sur la gauche mais la perte d’équilibre obligeait Borja à prendre l’épée pour… un bajonazo!
Paco Ureña, chef de cartel, touchait un exemplaire de Victorino, juste de présence mais qui n’éveillait aucune protestation… Ce toro sautait dans la cape, montrait quelque faiblesse des pattes arrière et fléchissait des antérieurs au sortir de la première pique. Le toro “humiliait” mais aussi flanchait dans quelques passes accélérées de la droite. Légèrement tobillero, ce toro ne permettait pas beaucoup de passes mais se révelait bien meilleur sur la gauche et Paco Ureña dessinait de bonnes naturelles mais ne profitait pas suffisamment de cet avantage. La muleta devait être bien maintenue pour éviter les retours caractéristiques des toros de cet encaste. Demi-estocade efficace. Le 4ème, un toro distrait sans fijeza, se déplaçait sans transmission, sans entrega, à la muleta. Quelques naturelles applaudies mais sans plus. Demi-estocade, tendida, basse.
Emilio de Justo touchait un toro juste d’hechuras, cornipaso. Des véroniques l’amenaient au centre du ruedo et “El Algabeño” faisait des efforts dans sa brega pour le maintenir à distance pour les piques… sans trop de résultat. Borja Jiménez échouait dans une tentative de quite alors qu'Emilio de Justo avait réussi le sien par chicuelinas et revolera. À la muleta, le toro terminait des doblones par un derrote. Les cites à mi-distance, des démarrages vifs et les derrotes en fins de passes étaient les ingrédients du trasteo d’Emilio de Justo qui ne parvenait pas à corriger le coup de tête final. Une estocade entière, “citée” à la course. Le cinquième avait une course bien meilleure que celle de ses congéneres. Beaucoup de passes, torero décollé de la trajectoire, cites à la voix, charges descompuestas du toro, attitude forcée, corrections de placement, certaine discontinuité du trasteo, formaient un ensemble peu homogène qui ressemblait à une faena pour le public en général, faena assez moyenne et ses scories, tant et si bien que l’estocade entière desprendida déclenchait une demande d’oreille – accordée - et des applaudissements au toro à l’arrastre.
Paco Ureña: saluts; silence. Emilio de Justo: ovation; un avis et une oreille. Borja Jiménez: silence; un avis et deux oreilles. Sortie a hombros par la Grande Porte. Des cuadrillas on remarquait Agustín de Espartinas aux ordres de Paco Ureña. Vuelta al ruedo di “Milhijas”, le 6ème. Temps caniculaire. No-hay-billetes 22. 964 entrées payantes |
Georges Marcillac