La corrida de Cebada Gago, une de celles qui sont redoutées pour leur spéciale bravoure et les difficultés qu’elles apportent, ne répondait pas aux espoirs des aficionados “toristes” montois et montrait plutôt des signes de mansedumbre… ce qui est inquiétant pour l'éleveur à la suite des résultats mitigés enregistrés récemment à Pampelune. Au terme du paseíllo, Domingo López Chavez recevait un cadeau de la Commission Taurine Montoise pour sa dernière course en France puisqu’il a décidé de se retirer de la profesión à la fin de la présente saison 2023. Fernando Robleño réapparaissait après sa blesssure à Pampelune le 8 juillet dernier. Jesús Enrique Colombo, était le troisième matador de ce cartel, auréolé de sa Puerta Grande, à Pampelune aussi, face à des toros de Miura. Donc une affiche de toreros aguerris aux batailles devant des toro réputés “durs”, ceux qui, habituellement, ne sont pas “offerts” aux matadors vedettes. Les toros de Cebada Gago font partie de cette catégorie mais faillissaient à leur réputation aujourd’hui sur le sable de Plumaçon. Des toros de quatre ans, sauf les 2ème et 6ème, raisonnablement armés, de hechuras semblables, longs et ne semblant pas porter les kilos que la balance doit avoir enregistrés. Quant au moral, ils ne furent absolument pas des exemples de bravoure, plutôt le contraire certains cherchant les planches ou plus directement la porte du toril!
Domingo López Chaves (DLC) ne devrait pas garder un souvenir très marquant de son premier paseíllo à Plumaçon et dernier passage en France, les spectateurs non plus. Son premier cebada-gago était placé à bonne distance de la cavalerie, tel qu’il en est fait dans les corridas concours, sans succès, car ce toro avait déjà montré son désintérêt pour le capote de DLC. Il recevait une première pique soutenue, la seconde, courte, rapidement relevée. À la muleta, sans la codicia suffisante pour enchaîner les passes, courtes les premières, il s’arrêtait même dans les suivantes, se retournait à mi-hauteur sur les passes de la gauche. Deux derechazos et la passe de poitrine et puis plus rien. Une estocade un peu arrière, facilement exécutée. Le 4ème semait la panique, coupant le terrain aux banderilleros qui plaçaient à la sauvette les palos, un à un. On se demande encore pourquoi DLC dédiait la mort de ce toro au public pour ensuite être incapable de le fixer, se défaussant dans les premières passes et uniques de la droite avant de prendre l’épée et porter un bajonazo!
Fernando Robleño recevait le 2ème par des véroniques qu’il conduisait vers le centre de la piste. Ce toro, acucharado de cornes, long, ensillado, ne s’employait pas au tercio de varas, se déplaçait correctement aux banderilles, mais restait court dans ses charges à la muleta, plus encore sur la gauche. À la dernière série de la droite, Fernando Robleño, en parfait technicien, s’accomodait parfaitement du caractère un tantinet reservón, de ce toro . À L’épée, il plaçait habilement une demi-lame dans un dernier élan du toro. C’est au 5ème que Fernando Robleño démontrait tout son talent et technique pour réduire à sa merci un toro manso, qui fuyait dans un premier temps la cape, sans envie de charger, sans se livrer dans les premiers capotazos. La première pique était prise al relance, sortant suelto deux fois avant de coller au peto, fuyant une fois de plus, de la pique suivante. Sans fixité, toujours en mouvement, il ne faciltait pas la tâche des banderilleros… Les doblones du début de faena avaient pour but d’arrêter ce toro mobile et fuyard. Ce qui fut fait. Les derechazos suivants, muleta simplemente avancée, le conduisaient avec mesure et temple. Les naturelles, courtes, parfaitement dessinées, furent la démonstration d’une technique consommée, d’une capacité à créer une petite oeuvre d’art alors que "Olivito", tel était le nom de ce toro, ne s'y prêtait pas. Importante faena des deux mains, des estampes de grande plasticité et beau toreo. La demi-estocade et plusieurs descabellos éliminaient l’octroi d’un trophée largement gagné.
Jesús Enrique Colombo (JEC) ne fallissait pas dans sa manière de conduire sinon ses faenas du moins le spectacle qu’il offre à la pose des banderilles, grâce à ses capacités physiques, son jeu de cape... pas toujours sa faena de muleta…. Il domine la course des toros, variant les cites, tenant compte intelligemment des terrains et querencias de ses partenaires, dans ce cas , les toros. Avant les piques, le 3ème était contraint de suivre la cape de JEC, il sortait suelto de chaque rencontre et allait même délibérément vers le toril. De la faena, peu de chose à retenir, si ce n’est un toro réticent à charger, faena terminée par des manoletinas et surtout une estocade portée à l’improviste, toro cadré sans préparation, roulant le toro en un instant. Seulement pour cet exploit, l'oreille était demandée et accordée. Le dernier marquait nettement sa mansedumbre et sa querencia vers les tablas. Un quite par navarras entre les piques et difficulté pour y conduire le toro. La faena de muleta était bougée, dans des terrains différents, pour toréer le manso qui revenait toujours vers le toril… Une serie en redondos et martinete de sortie et ce fut tout de notable dans cette faena. La tentative – incongrue – de la suerte a recibir, était suivie malgré tout d’un estoconazo. Le public conquis accordait à JEC une nouvelle vuelta al ruedo.
Domingo López Chaves: silence aux deux. Fernando Robleño: silence; vuelta al ruedo. Jesús Enrique Colombo: une oreille; vuelta al ruedo. |
Georges Marcillac
Photos : André Viard pour mundotoro.com