La deuxième novillada de San Isidro, avec une affiche plus prometteuse que celle de la semaine dernière ne remplissait qu’à moitié les espoirs mis en elle, du fait du comportement des novillos de l’actuel Comte de Mayalde, bien présentés mais exhibant des lacunes de bravoure associées à des faiblesses qui firent obstacle aux intentions du Malagueño Antonio Santana Claros et en moindre mesure au Mexicain Isaac Fonseca et au Sévillan de l’École Taurine de Madrid Álvaro Burdiel. Ce sont les novillos sortis en cinquième et dernière position qui offrirent les meilleures conditions pour amener les deux novilleros au bord du succès : Isaac Fonseca connectait avec le public par sa fougue, vaillance et son toreo varié alors qu’Álvaro Burdiel séduisait par sa classe et son « temple », moins impétueux que son compagnon mexicain. Tous deux échouaient à la mise à mort ! Isaac Fonseca est le triomphateur de la temporada passée alors que les deux autres novilleros venaient avec le bagage de seulement quatre novilladas en 2021. On notera que les novilleros intervenaient dans des quites variés où brillaientt particulièrement Isaac Fonseca par saltilleras, gaoneras et revolera au 1er ; Álvaro Burdiel par tafalleras et demi-véronique au 5ème.
Antonio Santana Claros signait une faena qui eut le mérite d’empêcher le premier novillo de développer des problèmes liés à sa forme de charge, toujours à la limite de donner le coup de corne dans ses passages dans la muleta. La fermeté et le placement du novillero évitaient l’accrochage latent. La faena presque exclusivement de la gauche ne pouvait avoir la continuité souhaitée, le novillo tardo et probón oblgeait à « perdre des pas ». Il ne passait pas très bien du côté droit mais Santana Claros le soumettait avant de prendre l’épée. L’estocade arrière était portée avec décision mais la corne droite infligeait une voltereta. En réalité c’est une cornada à la jambe droite, de pronostic réservé, que Santana Claros cachait puisqu’il restait en piste pour affronter le 4ème de Mayalde. Celui-ci, suelto, cherchant le refuge des tablas, était mal piqué, sortant seul de la première rencontre, recevant la deuxième puya très en arrière. Ce novillo de charge descompuesta, changeait de terrain et les « cites » de loin permettaient de fixer par inertie le novillo dans la muleta et réduire sa charge désordonnée dans les passes qui suivaient. La suite de la faena sera plutôt irrégulière et embrouillée avant quelques naturelles et une estocade verticale, contraire, desprendida.
Isaac Fonseca recevait son premier novillo par des véroniques et chicuelinas vibrantes et la demi-véronique de remate. Ce début promettait, sauf que le novillo se dépensait, poussait sous la première pique, n’était guère piqué à la seconde et perdait sa vivacité initiale. Aux banderilles, Iván García et Jesús « Tito » Robledo remplissaient leur fonction en bons professionnels. Les statuaires du début de faena et les finitions par le bas révélaient une faiblesse des pattes avant et les passes de la droite qui suivaient convainquaient le jeune Mexicain à prendre l’épée et porter une bonne estocade, basculant sur la corne droite. C’est au 5ème qu’Isaac allait bouleverser l’assistance par de nouvelles véroniques et les demies s’enroulant dans la cape. La suerte de varas était ratée de telle sorte que le novillo n’était pas piqué. Le quite au centre du ruedo par gaoneras et revolera retenaient l’attention du public pour la variété des lances mais aussi la frayeur d’une bousculade évitée, aussitôt enchaînée par une nouvelle passe. Après le brindis au public, genoux en terre, Isaac Fonseca effectuait le classique péndulo doublé avec la passe de poitrine. Un nouveau « cite » pour enchaîner des derechazos longs, « templés » et pase de pecho. La série suivante de la droite, agrémentée d’une arrucina liée à la passe de poitrine formaient un mélange de culot, désinvolture et bon toreo. Des naturelles ensuite, un passage par le dos, un farol et la passe de poitrine liés. Tout un florilège de passes, bien exécutées, brillantes, peut-être sans art, néanmoins émouvantes, le torero bien conscient de son office, prenant des poses et des pauses entre chaque séries. Les bernadinas finales mettaient un point d’orgue à cette faena accompgnée des ¡olés ! enthousiastes du public. Comme cela arrive souvent, après une telle faena, la mise à mort vient briser l’embellie : deux pinchazos et une bonne estocade ruinaient le succès qu’Isaac Fonseca avait au bout de l’épée. L’oreille demandée n’était pas accordée… Vuelta triomphale avec fleurs, drapeaux mexicains et… quelques larmes.
La réception du 3ème par des véroniques, jambe fléchie et les véroniques en delantales d’ Álvaro Burdiel mettaient en valeur le novillo qui mettait bien la tête dans le capote ainsi que le style classique et appliqué du jeune Sevillan/Madrilène. Le novillo chargeait bien le picador pour une pique mal placée mais rectifiée et dosée car on devinait les forces justes du mayalde. Dès le premier muletazo, une vuelta de campana n’arrangeait rien et les efforts de bien toréer d’Alvaro Burdiel n’avaient aucun effet. Des passes hautes aidées et un desplante. En conclusion, à l’épée, un pinchazo et une estocade entière desprendida quand sonnait un avis. C’est avec le 6ème, un novillo suelto, de moins bonnes hechuras que ses congénères, qu’Àlvaro Burdiel affichait ses capacités pour surmonter les difficultés que présentait le novillo. Celui-ci tentait à tout moment de fuir les capes, fonçait al relance sur le bon picador qu’est Alberto Sandoval, le désarçonnait sous le choc et l’empêchait de mettre la puya. Le novillo n’était pas piqué et le président ordonnait le cambio !! Aux banderilles ce n’était guère mieux, le novillo vif dans sa course, poursuivait les banderilleros jusqu’aux planches. Les doblones, genou en terre, fixaient le novillo inconstant et le déplaçait au-delà des lignes. L’impératif de chaque série était de maintenir le novillo dans la muleta, ce que faisait Álvaro Burdiel, un peu décollé de la trajectoire mais réduisant quand même l’espace dans des naturelles. Les passes étaient raccourcies dans le but d’éviter que le novillo ne s’échappe. Le meilleur venait en fin de faena par de nouveaux doblones, une excellente naturelle et des passes par le bas en se rapprochant du tercio. Une fois le novillo cadré, Álvaro dilapidait une faena intelligente, empreinte d’un bon style et sens du « temple » par un pinchazo et une estocade très, très en arrière.
Santana Claros : un avis et silence aux deux. Isaac Fonseca : saluts ; tour de piste triomphal. Álvaro Burdiel ; un avis et silence aux deux ; un avis et saluts. Raúl Ruiz de la cuadrilla d’Isaac Fonseca saluait aux banderilles. |
Georges Marcillac
Photos Plaza 1 et Cultoro