Alcurrucén avait envoyé un lot de belle prestance au pelage varié. Manquaient la caste et du moteur. Les trois toreros ont eu des moments adoubés par le public. Dans l’ensemble le sentiment général fut celui de la déception.
Morante de la Puebla n’hésite pas à se confier à la cape face à son premier alors même que la charge est retenue et brusque. Le toro pousse sous une bonne pique. La seconde, longue, est prise sans conviction. Bonne prestation de Curro Javier avec les garapullos. Le tanteo de Morante semble présager le meilleur. A droite, il torée passe par passe avec sérieux et patience. À l’entame de la seconde série le toro est rivé au sol. Morante insiste et arrache des passes. Lorsqu’il tente la gauche le toro reste immobile et Morante n’a pas non plus opté pour l’attaque de provocation. Demi-lame à bout de bras. Sifflets au toro. Silence.
Le second de Morante, cornalón, acucharado, est acceuilli par véroniques rythmées et demi-véronique dominatrice. L’alcurrucén tourne autour du cheval à la première pique puis s’emploie en carioca au second passage. Le maestro démarre fort dans des passes par le haut exigentes, en courbe. La suite à droite est accrochée. Alors que Morante semble en mesure de s’imposer à gauche, le bicho tire le rideau et subséquemment se résiste à charger sur les deux cornes. Deux naturelles et un molinete isolés font rugir la Maestranza. Plusieurs pinchazos et descabellos. Silence.
Sébastian Castella réalise un passage par véroniques "templé" et lent qui justifie les olés ! Le tercio de varas est mené rapidement sans particularités. Chicuelinas et larga de Tomás Rufo. José Chacón salue pour une prestation de haut niveau aux banderilles. Brindis au public. Castella prend la mesure a más de l’alcurrucén dans les premiers muletazos sur jambe fléchie. À droite, il tarde, mais finit par réaliser une série liée. La même chose se reproduit à gauche avec la sensation du peut mieux faire. C’est dans la série suivante, liée sur les deux cornes, que la faena est vraiment lancée. Musique. Ensuite, ce qu’il n’arrive pas à reproduire, le matador le compense par arrimón et acrobaties. Estocade entière trasera et desprendida. Pétition minoritaire, applaudissements au toro et au torero qui salue.
Le cinquième doute avant de charger la cape de Castella où il montre qu’il fait l’avion. Manso aux piques, passant d'un cheval à l'autrel le public proteste à propos de la mansedumbre évidente sans se rendre compte de la qualité de charge du toro. Castella s’avance au tercio pour rejoindre le toro et lui servir une série courte à droite, corps relâché. La suite sur la même corne se déroule en deux parties avec aguante et main basse, d’où ressort un cambio de mano long. Musique. Une série à gauche avec trincherilla et passe de poitrine lui valent l’ovation du public. Entre les séries, il y a des moments d’indécision. La suite à gauche a fortement baissé de ton. Le Français insiste sans arriver à retrouver le rytme de début de trasteo. Il fallait tout miser sur quatre séries bien construite et ne pas attendre le résultat d’un faena sur la longueur avec un tel opposant. 3/4 de lame et descabello avec avis. Palmas et salut.
Tomás Rufo touche un toro berrendo en negro qui freine dans sa cape, puis va et vient en se retournant à l’envers. Le toro sort seul rapidement de la première pique. Lors du second voyage, le bicho est contraint à recevoir l’épreuve. La faena démarre par un tanteo enchaîné sur une série droitière facile. En position marginale, le matador lie à droite. La suite à gauche est laborieuse et montre un toro qui ne termine aucunes de ses charges. Le public proteste alors que Rufo insiste. Deux pinchazos et le toro s’allonge. Silence.
Le dernier d'Alcurrucén de la corrida est lourd et rebondit sur ses appuis dans la cape de Tomás Rufo. Le tercio de piques ne met en valeur aucun des protagonistes. Brindis au public. Les premiers muletazos droitiers sont engagés, la charge transmet peu. La série suivante se termine en position marginale sur le dernier derechazo et le pase de pecho. A gauche, les premiers toques, por fuera, sont suivis de naturelles peu profondes. Le toro avance difficilement et la suite est poussive sur la corne droite. Entière desprendida. Silence.
René Arneodau