La première novillada du cycle de corridas de la San Isidro – qui en comptera trois – était d’El Montecillo, élevage de Paco Medina qui après s’être défait de El Ventorillo formait en 2005 une nouvelle camada avec quelques têtes de son précédent élevage auxquels s’ajoutaient des produits de Antonio Arribas et Soto Gutiérrez d’origine JP Domecq. Les novillos d’El Montecillo étaient à l’affiche l’an passé et n’avaient pas été particulièrement appréciés en raison de leur mansedumbre et complications pour les novilleros. Le lot d’aujourd’hui n’était guère mieux du point de vue de leur bravoure mais deux d’entre eux, les 4ème et 5ème, permettaient ou auraient permis mieux que le résultat brut enregistré. En général bien présentés, les novillos, certains d’allures de toros faits, donnaient des signes de mansedumbre comme les 1er et 4ème, de distraction parfois, de bravoure au cheval les 2ème et 4ème, manque de continuité durant les faenas, de danger le 5ème sur la corne gauche et 6ème des deux côtés. A l'affiche, deux novilleros sévillans – Pablo Aguado et Rafael Serna – revenaient à Madrid après quelques vicissitudes lors de leurs présences précédentes ils méritaient toutefois d'être revus, ils étaient accompagnés du Vénézuélien Jesús Enrique Colombo dont c’était le premier paseillo à Las Ventas.
C’est justement le jeune Vénézuélien qui impressionnait le public - > 18.000 spectateurs – par son assurance et sa désinvolture, son aisance à la pose des banderilles et sa fougue pour bien faire et gagner la sympathie du public, sans forfanterie. Sa prestation à son premier révélait déjà des qualités pour se placer, de bien manier cape et muleta à un novillo qui n’avançait plus sur la fin de la faena alors que les passes du début donnaient quelque espoir. Malgré cela, il parvenait à extraire de ce toro ingrat des naturelles que l'on qualifierait de "propres". C’est au quatrième, un novillo/toro de 482 kg, que Jesús Enrique démarrait en trombe sa faena sur la droite profitant des charges vives du novillo dans deux séries précédées de doblones pour justement tempérer cette charge à priori difficile à canaliser. Sur la corne gauche la faena baissait d’intensité et de qualité, un désarmé après un enganchón et le novillo se désunissait, sans la même promptitude de charge du début. Pour conclure, des bernadinas ultraserrées des deux côtés suivies d’une estocade dans laquelle J. E. Colombo s’engageait avec force et recevait un coup de plat de corne au genou droit. L’effet de l’accrochage, celui de l’estocade et la pose des banderilles en intermède (une sensationnelle après un passage à faux volontaire, la violence de la course du novillo et parfaite réunion face aux cornes) justifiaient une demande majoritaire d’oreille que le président refusait… Tour de piste triomphal mais dépité du torero et bronca au président.
Pablo Aguado montrait deux traits de sa personnalité. Paraissant timoré à son premier montecillo et au contraire vaillant, artiste et compétent à son second. Il faut bien dire que dans les deux cas il fallait résoudre un problème. Le premier, à son actif un des meilleurs combats sous la pique de cette feria, donnait un sérieux avertissement de sa corne droite et le répétait au début de série suivante. Sur la gauche ce n’était guère mieux, sans le danger latent mais la charge n’était pas claire, d’où des naturelles qui paraissaient sans intérêt. Le novillo n’ "humiliait" pas, ce qui compliquait l’affaire. Le second demandait du cran pour recevoir des charges extrêmement violentes avec le museau au ras du sable. Pablo Aguado était bousculé à la première statuaire et, corrigeant sa position, il enchaînait de bons et jolis derechazos avec mando, la muleta basse. Peu à peu, la conjonction des passes et la course du novillo diminuait, confirmée de même sur la gauche. Une série de la droite, pieds joints, dans le tercio, relevait le niveau de la faena suivie de quelques doblones pour fixer le novillo pour l’estocade qui résultait un peu tombée. La fermeté de Pablo Aguado avait été l’attitude exacte à avoir avec ce novillo car le contraire aurait créé sans doute la débandade d’un novillero non préparé.
Rafeal Serna ne pouvait rien montrer de positif car si son premier se laissait donner quelques jolis derechazos, longs et profonds en début de faena, il capitulait rapidement pour ne plus avancer alors que le dernier, lui n’acceptait aucun semblant de passe car il allait directement au corps du torero. Les novillos étaient exécutés selon leur condition: facilement et habilement en allongeant le bras, respectivement.
Jesús Enrique Colombo: saluts ; un avis et vuelta. Pablo Aguado: un avis et silence ; saluts. Rafael Serna: silence aux deux
Georges Marcillac