Madrid 1er juin 2019 – 19ème de Feria – Inspiration, improvisation, maestria, torería et Puerta Grande d’Antonio Ferrera.

Il est difficile de faire contenir dans un titre la liste des qualités toreras mises en évidence par Antonio Ferrera en sa première corrida du cycle de la San Isidro. Les craintes de son absence aujourd’hui et la semaine prochaine étaient dans l’esprit de tous et en guise de reconnaissance, le public le recevait par une sympathique ovation. Il associait ses deux compagnons de cartel Curro Díaz et Luis David Adame à répondre à l’ovation, ceux-ci refusaient puisque l’Extremeño en  était le seul destinataire, et pour cause. Antonio Ferrera se limitait à garder et «lidier» le premier de Zalduendo de nom «Bonito»  un peu suelto qui prenait deux piques courtes sans forcer. A la sortie de la première pique, un quite de frente por detras dans le cite mais poursuivi en quite de oro, fleuri, gracieux et torero était pure improvisation. Après un brindis, un genou en terre, au ciel, dont on ne connaîtra  jamais l’objet, sans aucun tanteo,  commençait une faena étrange où tout semblait couler de source tant la charge du toro était fluide et la muleta d’Antonio Ferrera, inspiré, attirante et douce. Comme à son habitude, il se débarrassait de l’épée ayuda pour toréer en naturelles, naturellement, des deux mains, le corps vertical, le toro aspiré, noble et renouvelant ses charges avec qualité. Les cites à distance donnaient encore plus de valeur à la quiétude et le «temple» du torero. Des changements de main limpides. Une œuvre fugace et émouvante venait d’être créée devant nos yeux. Le toro presque rajado était finalement repris au tercio par de nouvelles naturelles.

                        

Après quelque difficulté pour mettre en suerte pour la mise à mort, Antonio se profilait à grande distance «citait» le toro qui venait au pas pour une estocade a recibir entière, un peu tombée. Le président restait inflexible à la demande de la deuxième oreille, il en recevait la bronca et le public obligeait Antonio Ferrera à effectuer une deuxième vuelta d’honneur. Le quatrième de Zalduendo, laid de hechuras, de 607 kg, hondo impactait fort la cavalerie à la première rencontre mais ne poussait pas et à la deuxième «protestait» contre le peto. Le début faena ne donnait grand espoir car le toro sortait de la muleta par des hachazos et la charge courte ne disait rien de bon. Sur la gauche une série un peu meilleure, le maestro «perdait» quelques pas pour remettre le toro dans la muleta avant que celui-ci, rajado, se dirigeait vers les tablas. C’est alors qu’Antonio Ferrera donnait un récital de passes des deux mains selon la position du toro et sa tendance à charger pa’dentro. Soit fixe, soit en mouvement, il exprimait de ce toro les charges qu’il avait cachées auparavant. Une passe par le bas, un molinete invertido lié à la passe de poitrine culminaient cette faena en deux temps aboutie par une nouvelle estocade a recibir un peu tombée, mais quelle exécution ! Cette fois les deux oreilles étaient accordées, sans doute la deuxième en compensation de celle refusée du premier toro.

Les toros de Zalduendo portaient une devise noire en signe de deuil de la disparition récente de leur précédent propriétaire Fernando Domecq. Cinq cinqueños, un cuatreño le 6ème étaient pourvus d’armures imposantes, d’hechuras diverses et de comportement, pour certains allant a más comme les 3ème et 6ème. Malgré leurs poids et certaine velléité à flancher ils tenaient le coup jusqu’à la fin. Le 5ème manso.

Curro Díaz touchait un premier toro qui se déplaçait peu, que l’on ne châtiait presque pas aux piques. A la muleta, il s’arrêtait entre passes et passes et entrait court bien que sa charge, l’espace d’une série à gauche, était plus longue. Sans transmission il n’éveillait aucun intérêt du public. L’estocade entière desprendida suscitait quelques applaudissements. Le 5ème, manso recevait un quite de Luis David Adame par gaoneras, caleserina et revolera sans mettre vraiment la tête. La faena du torero de Linares allait être une course poursuite pour donner deux passes, pas plus, et le toro fuyait cherchant la sortie…. Estocade basse, presque en bajonazo.

Luis David Adame recevait le 3ème zalduendo à la cape et la colada sur la gauche l’incitait à éloigner ce toro des barrières. Aux piques, sans pousser, il prenait le large et le quite par chicuelinas de LDA se faisait en deux temps. La faena commençait avec la même tonalité, des charges courtes qui s’allongeaient sur la gauche, sans grande transmission. Mais une série de la droite mieux réunie et une suivante avec répétition marquaient un changement d’attitude du toro qui allait a más sans toutefois montrer une grande classe dans son passage dans la muleta. Un pase circular, des manoletinas concluaient cette faena meilleure sur la fin avant que ne soit portée avec décision une estocade entière desprendida. Le public avait apprécié cette fin de faena plus animée et demandait l’oreille qui n’était pas accordée. Le 6ème qui semblait flageoler à sa sortie en piste, qui chutait même,  se reprenait par la suite mais se défendait dans ses charges et portait des hachazos en fins de passes. Après un brindis à Alberto Baillères, actuel propriétaire de la ganadería de Zalduendo et son compatriote, Luis David Adame entamait sa faena par des statuaires, une série de la droite et à la suivante, bousculé par un toro, sans avoir le temps de se dégager il était déséquilibré, secoué au sol et soulevé en l’air. Emporté groggy à l’infirmerie, il en sortait vaillamment pour deux séries de la droite qui confirmait la condition de ce toro, par ses accrochages de muleta. Les bernadinas finales, molinete et passe de poitrine, le tout lié était fêté par le public. Deux pinchazos hondos  et deux descabellos.

Antonio Ferrera: une oreille et deux vueltas ; un avis et deux oreilles et sortie a hombros. Curro Díaz : saluts aux deux. Luis David Adame : saluts ; un avis et silence. Deux-tiers d’arene. Temps chaud… sans vent.

Georges Marcillac

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