Le titre de cette reseña en dit long de cette corrida-phare de La Madeleine qui se déroulait à guichets fermés. Les trois toreros venaient avec un curriculum suffisamment éloquent pour satisfaire toutes les catégories d’aficionados et du public en général. Andrés Roca Rey, le Nº 1 actuel était associé à Juan Ortega, le Sévillan, référence actuelle avec Morante de la Puebla de cette música callada du toreo chantée par José Bergamin. Clément Dubecq “Clemente” les accompagnait, capable lui aussi de “déboucher le flacon des essences” comme il y a deux ans dans ces mêmes arènes… Aujourd’hui les toros de El Parralejo ont réduit à néant les espoirs de tous, participants et public. Qu’en diront le propiétaire et le gérant de l’élevage? En tout cas, ce qui est sûr, c’est qu’ils avaient été bien engraissés tant l’excès de poids était évident aux yeux les moins avertis des hechuras des toros de lidia. Une caractéristique commune à ces toros est qu’ils sont courts sur pattes, pas très encornés – d’où les protestations qui fusaient dès leur sortie du toril. Précisemment, les pattes avant avaient peine à soutenir le poids et les efforts de course et combat face au cheval d’abord, durant la faena de muleta ensuite.
Juan Ortega, inhabituel chef de cartel, ne pouvait nous délecter de ses véroniques au ralentí, dont il est le maître, face à ces deux toros. À cela, une vuelta de campana du premier, n’arrangeait pas la situatuion après une génuflexion à la sortie des piques… insignifiantes. Il n’y eut pas de faena! sauf des charges insipides et muletazos idem. Le 4ème faible… des quatre pattes, allait tout de même tout seul au cheval -al relance – sans pour autant recevoir un châtiment digne de ce nom, pique relevée et picotazo à la deuxième rencontre. Le tanteo se composait de passes isolées, suaves, un trincherazo, un molinete et c’était la chute de l’animal qui ensuite se traînait devant une muleta qui se voulait convaincante … Inutile de décrire les mises à mort de pinchazos estocades habiles…
Andrés Roca Rey est un torero honnête au point qu’il fit tout pour satisfaire le (son) public en construisant des faenas usant de tout son répectoire: passes les pieds rivés au sol, passes en redondo à genoux au centre la piste, au 2ème, trois péndulos au 5ème alternés avec passe de poitrine, passe par le bas, le tout lié dans un mínimum d’espace, les inévitables passes circulares inversées, impromptues passes dans le dos, etc. A noter un quite de ARR par caleserinas et tafalleras. Quant aux passes fondamentales, la faiblesse ou la manque de vivacité des charges de ses opposants les rendaient totalement sans intérêt. À l’épée, presque un bajonazo et son effet rapide au 2ème, une bonne estocade au 5ème, ne déclenchaient que de faibles pétitions d’oreille, peu de mouchoirs en réalité. Inutile de rappeler que, comme à leur habitude, les picadors de ARR ne piquaient ni châtiaient ses toros, les laissaient "crus". Ce qui fut fait mais, aujourd’hui, cette recommendation s’imposait à tout le monde et les picadors étaient applaudis!
“Clemente” était plus chanceux, si l’on peut dire, car ses deux toros lui permettaient de réaliser des faenas dont pourrait dire qu’elles montraient que notre compatriote, étant plus toreado avec donc plus d’expérience, pouvait se sortir de situations comme celle d’aujourd’hui avec des toros insignifiants. Il en tirait néanmoins le maximum, arrivant à dessiner des passes, principalement de la droite, profondes et parfois “templées”. Bien que le 2ème terminait épuisé Clemente tirait d’un animal presque arrêté d’originaux pases del telón avant de monter l’épée. Son désir de bien faire lui faisait poursuivre ses faenas au delà des limites de forces des toros ce qui conduisait inévitablement à des finitions embrouillées comme au 6ème. Ses mises à mort étaient plutôt défectueuses. Une demande d’oreille à la suite d’une mort rapide du 2ème n’était pas accordée. En résumé hormis ces défaillances à lépée, Clemente s’était imposé bien au-dessus des “qualités” de ses deux opposants et avait marqué de son sceau - en bien - cette triste après-midi.
José Ortega: silence aux deux. Andrés Roca Rey: saluts après pétition d’oreille; silence. “Clemente”: saluts; un avis et saluts. La plupart des toros de El Parralejo sifflés à l’arrastre. |
Georges Marcillac
Photos. André Viard pour mundotoro.